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Telegram : Pavel Durov accuse la France de pressions politiques

1 octobre 2025

Temps de lecture : 5 minutes
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Telegram : Pavel Durov accuse la France de pressions politiques

Temps de lecture : 5 minutes

Telegram : Pavel Durov accuse la France de pressions politiques

En résumé :

  • Une demande de cen­sure poli­tique ? Pavel Durov affirme avoir été sol­lic­ité par un inter­mé­di­aire lié aux ser­vices français pour cen­sur­er des canaux mol­dav­es avant l’élection présidentielle.
  • Un refus de Durov : un pre­mier lot de chaînes, réelle­ment en infrac­tion avec les règles de Telegram, a été sup­primé ; une sec­onde liste, essen­tielle­ment poli­tique, a été rejeté
  • Instru­men­tal­i­sa­tion politi­co-judi­ci­aire : Durov dénonce une ten­ta­tive d’instrumentaliser sa sit­u­a­tion judi­ci­aire en France, après son arresta­tion en août 2024 (Reuters)
  • Les autorités français­es nient, accu­sant le fon­da­teur de Telegram de jouer avec le cal­en­dri­er électoral.
  • L’affaire illus­tre le dilemme crois­sant entre sécu­rité nationale, élec­tions pro­tégées et lib­erté d’expression sur les grandes plate­formes numériques.

Le fon­da­teur de Telegram, Pavel Durov, a pub­lié fin sep­tem­bre un mes­sage pub­lic affir­mant qu’un inter­mé­di­aire, au nom des ser­vices de ren­seigne­ment français, lui aurait demandé — alors qu’il se trou­vait sous con­trôle judi­ci­aire en France — de faire retir­er cer­tains canaux Telegram « au béné­fice » du gou­verne­ment mol­dave avant les élec­tions. Selon Durov, quelques chaînes effec­tive­ment con­traires aux règles de Telegram ont été sup­primées, mais une sec­onde liste qui lui aurait été trans­mise com­pre­nait essen­tielle­ment des médias et voix poli­tiques légitimes, « unique­ment parce qu’ils expri­maient des opin­ions déplaisantes aux autorités français­es et mol­dav­es ». Durov affirme avoir refusé de procéder à ces sup­pres­sions poli­tiques et dit avoir dénon­cé publique­ment la ten­ta­tive de pression.

Une accusation qui embarrasse Paris

Le fon­da­teur de Telegram, Pavel Durov, a pub­lié fin sep­tem­bre un mes­sage qui a fait l’effet d’un pavé dans la mare diplo­ma­tique. Selon lui, alors qu’il se trou­vait sous con­trôle judi­ci­aire en France, un inter­mé­di­aire man­daté par les ser­vices de ren­seigne­ment aurait sol­lic­ité son aide pour cen­sur­er plusieurs canaux mol­dav­es avant l’élection présidentielle.

Après exa­m­en, cer­tains d’entre eux ont bien été retirés pour infrac­tion aux règles de la plate­forme, mais la demande aurait rapi­de­ment glis­sé vers une liste essen­tielle­ment poli­tique, com­posée de chaînes respec­tant pleine­ment les règles de Telegram. Devant cette dérive, Durov dit avoir opposé un refus.

Ce que Durov dit exactement (et comment il l’explique)

Dans son mes­sage, Durov relate qu’un pre­mier lot de canaux « claire­ment en infrac­tion » a été retiré par Telegram après exa­m­en, mais que l’intermédiaire lui aurait alors expliqué que, en échange de cette coopéra­tion, les ser­vices français « dire[raie]nt du bien de lui » auprès du juge ayant ordon­né son arresta­tion l’année précé­dente — une promesse, selon Durov, inac­cept­able parce qu’elle pour­rait con­stituer une ten­ta­tive d’« ingérence dans le proces­sus judi­ci­aire ». Il ajoute que, si la promesse n’était qu’une « façon de par­ler », elle révélait en tout cas l’exploitation de sa sit­u­a­tion judi­ci­aire pour peser sur des proces­sus poli­tiques étrangers.

Réactions officielles et posture française

Dès la pub­li­ca­tion de l’accusation, la réac­tion offi­cielle française a été de rel­a­tivis­er et de rap­pel­er que Pavel Durov avait déjà porté des accu­sa­tions sim­i­laires à d’autres occa­sions élec­torales. Les comptes ren­dus publics (presse et canaux offi­ciels) sig­na­lent un démen­ti indi­rect : la France nie l’existence d’une con­signe de ce type et con­sid­ère les déc­la­ra­tions de Durov comme inop­por­tunes, surtout en péri­ode élec­torale. À ce stade, aucune preuve publique (enreg­istrement, doc­u­ment offi­ciel) n’a été pro­duite par Pavel Durov pour cor­ro­bor­er le rôle pré­cis d’un ser­vice français.

Les enjeux juridiques et éthiques soulevés

Les allé­ga­tions de Durov posent, même comme sim­ple hypothèse, plusieurs prob­lèmes lourds :

  • Indépen­dance de la jus­tice : s’il exis­tait un lien de troc entre une demande de cen­sure et une inter­ven­tion auprès d’un mag­is­trat, il s’agirait d’une ten­ta­tive d’ingérence dans le fonc­tion­nement de la jus­tice — un principe fon­da­men­tal des démoc­ra­ties. (Durov avance explicite­ment cette crainte.)
  • Pres­sion sur les plate­formes : la demande pré­sumée illus­tre le dilemme clas­sique des États face aux « gate­keep­ers » numériques : jusqu’où peu­vent-ils sol­liciter la sup­pres­sion de con­tenus poli­tiques sur des plate­formes glob­ales et chiffrées sans franchir la ligne vers la cen­sure politique ?
  • Crédi­bil­ité et trans­parence : quand une entre­prise comme Telegram, ou un État, avance des faits très sen­si­bles, la con­fi­ance publique exige des élé­ments véri­fi­ables. Sans preuve publique, l’affaire reste au stade des accu­sa­tions récipro­ques, ce qui frag­ilise la posi­tion de toutes les parties.

Le précédent évoqué par Durov : la Roumanie

Durov rap­pelle qu’il avait déjà accusé des ser­vices français d’avoir demandé des sup­pres­sions sim­i­laires en Roumanie lors d’un précé­dent cycle élec­toral — allé­ga­tion elle aus­si démen­tie par Paris. Ces répéti­tions, si elles sont avérées, trac­eraient un sché­ma préoc­cu­pant ; si elles ne le sont pas, elles par­ticipent à une stratégie de com­mu­ni­ca­tion agres­sive de la part d’un dirigeant en con­flit judi­ci­aire. Les faits devront être exam­inés avec méthode.

Où en est-on factuellement ?

L’affirmation cen­trale — qu’un inter­mé­di­aire a pro­posé un échange entre cen­sure de canaux et inter­ven­tion favor­able auprès du juge — émane de Pavel Durov et fig­ure sur son compte public.

Reuters et d’autres médias de référence ont relayé la déc­la­ra­tion et l’ont mise en rela­tion avec la sit­u­a­tion judi­ci­aire de Durov en France et avec les élec­tions en Mol­davie. Les autorités français­es ont nié les allé­ga­tions et cri­tiqué le cal­en­dri­er des révélations.

Libertés numériques en sursis

L’affaire met en lumière le dilemme auquel sont con­fron­tés les États comme les plate­formes : garan­tir la sécu­rité des proces­sus démoc­ra­tiques sans trans­former des out­ils de com­mu­ni­ca­tion privés en instru­ments de con­trôle. Telegram, de son côté, insiste sur son engage­ment en faveur de la lib­erté d’expression et affirme qu’aucun con­tenu ne sera sup­primé pour des raisons poli­tiques. Mais cette con­tro­verse ren­force la défi­ance du pub­lic, déjà méfi­ant face aux col­lu­sions pos­si­bles entre pou­voirs poli­tiques et grandes entre­pris­es numériques.

Yves Leje­une

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