La période récente a été compliquée pour le service public audiovisuel, notamment parce que le soupçon de ne pas représenter tous les Français a été étayé concrètement par la collusion entre certains journalistes et des responsables socialistes. Mais la gauche se sent chez elle sur le service public. Et elle voudrait dicter ce qui peut s’y dire et ce qui y est interdit. Pour prévenir toute tentative de recentrage, recentrage au demeurant très hypothétique et que nous n’avons pas véritablement observé, les médias de gauche et d’extrême gauche font monter la pression sur le service public.
Lorsque France Info TV est ciblée
Malgré son appartenance à France Télévisions et la synergie qui pourrait exister avec les autres chaînes du groupe, France Info TV ne se porte pas très bien ; la chaîne est distancée par CNews, BFMTV et LCI, et elle se classe bonne dernière des chaînes d’information en continu avec environ 1% d’audience. La chaîne a essayé de se renouveler, peut-être même de sortir d’un certain carcan. Elle a ainsi recruté Nathan Devers et Paul Melun qui officiaient auparavant sur CNews. Les deux chroniqueurs interviennent maintenant dans l’émission « Le pour et le contre », dont l’ambition est de proposer un nouvel espace de débat sur la chaîne.
C’en est déjà trop pour le média Arrêt sur images, qui étrille la chaîne publique dans une enquête intitulée « La chaîne Franceinfo est-elle en train de devenir CNews ? ». Nathan Devers et Paul Melun y sont dénoncés pour avoir évoqué la Seine-Saint-Denis comme « la plaque tournante de la nouvelle criminalité organisée » suite au vol du Louvre, et pour avoir invité le philosophe Michel Onfray. Au-delà des deux transfuges de CNews, Arrêt sur images s’en prend aussi à plusieurs émissions de France Info TV : le direct consacré au lancement du livre de Jordan Bardella, l’invitation de Gilbert Collard ou de Nora Busigny, et la réception de Laurent Alexandre à propos de son dernier livre.
Télérama est exactement sur la même position. Dans un article « Complotisme et “grand remplacement” : quand un débat de Franceinfo parodie CNews », l’hebdo télé culturel bobo en ajoute une couche contre France Info TV :
« Depuis la rentrée, Franceinfo a confié une émission de débat à deux anciens de CNews, Nathan Devers et Paul Melun. Quand ils invitent une star de CNews, Michel Onfray, difficile de faire la différence avec la chaîne de Bolloré. »
Précisons que selon Pascal Praud, qui est toujours en contact avec ses deux anciens chroniqueurs, ceux-ci ont été convoqués par le délégué CGT pour avoir osé inviter Michel Onfray.
Enfin, le site d’information Blast s’attaque à France Info TV de façon plus virulente encore. Un article « Opposition médiatique mais connivences éditoriales : la « drôle de guerre » de France Télévisions avec l’extrême droite » accuse les 2 chroniqueurs d’avoir choisi de parler d’immigration, un sujet qui, comme chacun sait, ne préoccupe pas du tout les Français. Mais Blast élargit la critique de la chaîne d’information en s’en prenant aux « réquisitoires délirants du journaliste Gilles Bornstein contre la députée Rima Hassan », à « la criminalisation permanente des mouvements sociaux », à « la récurrence des discours pro-Macron », et à la « promotion du génocide à Gaza », rien de moins.
Au-delà de France Info TV, c’est ensuite France Télévisions qui est accusée de « s’aligner sur les obsessions des médias Bolloré » ; le journal télévisé de France 2 est particulièrement ciblé, auquel il est reproché de traiter les mouvements sociaux sous l’angle des perturbations pour les usagers, d’évoquer le trafic de drogue et les règlements de comptes à Rennes ou de parler de la bénédiction du « cardinal conservateur » Bustillo.
On disait d’une personnalité que la gauche s’efforce de rejeter dans le camp du mal sans avoir à écouter ses arguments qu’il était « extrême droitisé » ; dorénavant, on pourra dire d’un média que la gauche essaye de disqualifier qu’il est « CNewsé ».
Lorsque la CGT se fait juge de la ligne éditoriale
Au commencement se trouve un article paru sur le site de France 3 Île-de-France sur la commémoration des attaques du 7 octobre 2023. La CGT de France TV a brutalement réagi en publiant le 13 octobre un communiqué intitulé « Le communautarisme n’a pas sa place sur FTV ». Diable, de quel communautarisme s’agit-il ?
Le syndicat reproche à la journaliste « d’adopter le point de vue de la communauté juive » et de relayer « les thèses du CRIF ». Il lui est aussi reproché l’usage du mot « pogrom », qui ne serait pas approprié car les victimes du 7 octobre sont « citoyens d’un État qui occupe, oppresse et colonise un autre peuple ». Le syndicalisme devrait conduire à défendre les journalistes de la chaîne. La CGT abandonne cette mission au profit d’un militantisme qui vise à orienter la ligne éditoriale.
Ce type d’intervention permet de mesurer l’emprise syndicale sur le service public. Dans de telles conditions, il n’est pas difficile d’imaginer combien la direction doit en permanence composer avec un pouvoir syndical militant ni comment cette emprise pèse sur les journalistes et peut les conduire à l’autocensure.
Lorsque les directions désavouent leurs journalistes
C’est précisément ce qu’ont fait les directions de France Inter et Radio France à la suite d’une interview de Manuel Bompard. En cause, notamment une question posée à M. Bompard sur Zohran Mamdani, nouvellement élu maire de New York :
« Il est ouvertement propalestinien et il a repris en son temps le slogan “Mondialiser l’Intifada”. En clair, faire la guerre aux juifs partout dans le monde. Et quand on lui demande de condamner le 7 octobre, et bien souvent il botte en touche et répète que le problème c’est l’occupation d’Israël. Est-ce que ça ne vous choque pas ? ».
Après que LFI eut annoncé saisir l’ARCOM, les directions de France Inter et Radio France ont publié sur X et sur le site de l’émission un message recadrant leur journaliste :
« Lors de “Questions politiques”, dont le député Manuel Bompard était l’invité, des questions d’Alix Bouilhaguet sur Zohran Mamdani ont suscité des interrogations de nos auditeurs. Radio France et France Télévisions y répondent » ; « on ne peut pas dire qu’il n’a pas condamné le 7 octobre, car dès 2023 il a dénoncé des crimes de guerre. Il dénonçait encore le 7 octobre 2025 des « crimes de guerre horribles ».
Les propos incriminés sont bien sûr discutables. Nous nous limiterons ici au constat que des appréciations similaires sur Zohran Mamdani ont été tenues sur d’autres médias, sans générer ce type de réaction. Comment ne pas voir dans ce lâchage, rarissime, la crainte des censeurs ? Entre communiqué des syndicats et recadrage de la direction, les journalistes du service public marchent sur des œufs.
Mesurons au passage combien cette polémique est uniquement à usage franco-français, tant il est probable que le nouveau maire de New York y est totalement indifférent.
Voir aussi : Zohran Mamdani, un musulman à la mairie de New York : une victoire symbolique pour les médias arabes
Le rôle des syndicats et l’avenir du service public
Il est intéressant de relever que les syndicats de l’audiovisuel public sont en pointe dans ces actions d’intimidation morale. Il existe manifestement une ligne directe entre ces syndicats et les médias de gauche. Dans tout ce qu’il nous a été donné de consulter, les journalistes citent très fréquemment les communiqués rageurs ou les interventions de la CGT France TV et de la SDJ (société des journalistes) qui semblent constituer leurs principales sources d’inspiration et de réflexion sur ces sujets.
Mais de quelles questions préoccupant les Français est-il encore permis de parler ? et avec qui ?
Si les médias du service public continuent de se soumettre aux diktats de leurs syndicats, bruyamment relayés par les médias de gauche, il est probable que la baisse des audiences risque de se poursuivre.
VOIR AUSSI https://www.ojim.fr/vote-syndical-a-lafp-gauche-et-extreme-gauche-dominent/
Francesco Bargolino


















