En résumé :
- Annulation à Noisy-le-Sec : la projection en plein air du film Barbie a été annulée sous la pression d’habitants musulmans invoquant la religion.
- Silence médiatique : Libération, Le Monde, Le Parisien et France 3 évoquent seulement un « groupe de jeunes habitants », minimisant le rôle de l’islam.
- Deux poids, deux mesures : lorsqu’il s’agit de catholiques, les médias parlent aussitôt d’« intégristes », de « radicaux », de « tradis », comme lors des affaires Anna von Hausswolff (2021) ou Piss Christ (2011).
- Stratégie journalistique : minimiser les pressions islamiques présentées comme « mineures », tout en amplifiant systématiquement les affaires impliquant des catholiques ou des Français.
- Information sélective : cette différence de traitement façonne l’opinion : ce dont on ne parle pas n’existe pas, ce qu’on grossit devient une menace centrale.
Un journaliste, c’est en principe fait pour informer. Tâche difficile, qui impose de discerner ce qui, dans la masse de données, relève de l’information importante. On ne peut pas toujours taxer les journalistes de désinformation, mais dans certains cas, les oublis sont aussi criants que coupables.
Un film trop woke pour les musulmans
C’est l’été, les Français chanceux partent en vacances, et d’autres restent chez eux. Dans les campagnes, ils font des randonnées et inventent tant bien que mal de quoi s’occuper pendant de longs mois. Dans les villes, notamment celles qui relèvent des plans banlieues, les subventions permettent de proposer certaines activités, notamment une : le cinéma en plein air. On vient en famille, on étend une nappe par terre et des chaises pliantes, on s’installe et on regarde un film tout public. C’est gratuit, agréable et facile. Noisy-le-Sec avait décidé, après consultation de ses habitants, de projeter le film Barbie.
Nous ne défendrons pas le film Barbie comme un monument du cinéma, d’une part parce que nous ne l’avons pas vu, d’autre part parce que ce n’est pas le portrait qu’en brossent les critiques, du moins celles qui ne se prosternent pas devant la morale féministe et progressiste. Noisy-le-Sec et ses habitants ont toutefois bien le droit de projeter ce qu’ils veulent. La phrase vous semble enfoncer des portes ouvertes ? Eh bien, pour une certaine partie de la population de Noisy-le-Sec, ville largement remplacée, Barbie n’a pas droit de cité. Certains habitants, au nom de l’islam, ont donc fait annuler la diffusion.
La charia s’installe, les médias se taisent
L’affaire a évidemment fait couler de l’encre dans les médias. Mais une encre curieusement filtrée. Libération en parle, évoquant « des pressions » ou une décision prise « pour éviter que les agents de la ville chargés de l’installation ne soient agressés ». Le tout n’en restera pas là puisque « l’élu assure qu’il va porter plainte ». Contre qui ? Mystère. Libé précise pourtant – en légende, texte rarement lu – que « le film Barbie avait été censuré dans de nombreux pays ». Toujours pas le moindre indice donc, sur les responsables du retrait du film. Il s’agit d’un « petit groupe d’une quinzaine d’habitants », de « censeurs ». On finit tout de même par apprendre que les menaces traduisent « l’obscurantisme et le fondamentalisme », et finalement que le film a été « censuré au Koweït, en Algérie ou au Liban ».
Bref, circulez, il n’y a rien à voir. Le Monde n’agit pas autrement, évoquant « une dizaine de jeunes hommes », « un groupe de jeunes habitants ». Il cite tout de même les hommes en question, qui affirment que leur rejet « n’a rien à voir avec l’islam ou la religion ». C’est ainsi que l’on apprend, à grand-peine, que les responsables du retrait du film Barbie sont musulmans. Le Parisien, tout comme France 3 Régions, donne également dans la discrétion en parlant d’un « groupe de jeunes habitants » et en citant presque à contrecœur les habitants évoquant l’islam.
« Groupe d’habitants » versus « catholiques intégristes »
Les médias rivalisent donc d’ingéniosité pour ne pas informer, pour éviter d’admettre qu’à Noisy-le-Sec, la projection d’un film a dû être annulée à cause de pressions islamiques. On n’observe pourtant pas une telle discrétion face à d’autres religions. En décembre 2021, la musicienne Anna von Hausswolff, connue pour ses morceaux joués sur des orgues, devait se produire dans une église nantaise. Or, certains paroissiens avaient, à l’écoute de ses chansons, trouvé que certaines phrases flirtaient avec le satanisme. Le soir du concert, certains s’étaient enfermés dans l’église, d’autres avaient formé un groupe de prière à l’extérieur, devant la porte, et le spectacle avait dû être annulé.
Ici, nul besoin de fouiller jusqu’à la fin des articles pour trouver mention des coupables. Les titres suffisent. Marianne évoque des « catholiques radicaux », France Bleu des « intégristes », Ouest-France, BFM TV et France info des « catholiques intégristes », Libé parle dans son chapeau de « cathos tradis ». Si les médias avancent aujourd’hui à visage particulièrement découvert, leur façon de procéder n’a rien de bien neuf. En 2011, des catholiques avaient vandalisé une œuvre d’art intitulée « Immersion, Piss Christ », où un crucifix était immergé dans de l’urine. Le Monde avait pris soin de pointer des « catholiques intégristes », ainsi qu’un certain nombre d’associations catholiques telles que Civitas ou le Salon beige, un « blog intégriste ».
L’information à deux vitesses n’est pas un complot, c’est une tactique
Au fond, la stratégie de certains journalistes est assez limpide. D’abord, laisser sous le tapis les méfaits « mineurs » imputables aux musulmans. L’interdiction d’un film où, finalement, personne n’a été agressé. Un vol sans violence. Une agression sans meurtre. La liste est longue, et les méfaits oubliés de plus en plus graves, puisque chaque semaine apporte son lot d’horreurs. Ensuite, lorsque les affaires viennent d’autres catégories, de préférence les Blancs, les Français, les catholiques, monter le tout en épingle. Pour montrer que cela existe, que les catholiques sont tout aussi dangereux que les musulmans, voire plus. Ce dont on ne parle pas n’existe pas, c’est bien connu. C’est juste un sentiment, comme l’insécurité.
Adélaïde Motte


















