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Liberté de la presse : Christophe Gleizes condamné à 7 ans de prison ferme par le régime algérien

7 décembre 2025

Temps de lecture : 6 minutes
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Liberté de la presse : Christophe Gleizes condamné à 7 ans de prison ferme par le régime algérien

Temps de lecture : 6 minutes

Liberté de la presse : Christophe Gleizes condamné à 7 ans de prison ferme par le régime algérien

Christophe Gleizes, jour­nal­iste français de 36 ans, spé­cial­isé dans le foot­ball africain, a été con­damné le 3 décem­bre 2025 à 7 ans de prison ferme pour « apolo­gie du ter­ror­isme » par la cour d’appel algéri­enne de Tizi Ouzou. Le col­lab­o­ra­teur réguli­er des mag­a­zines « So Foot » et « Soci­ety » s’était ren­du en Algérie en 2024 pour réalis­er un reportage sur un club de foot­ball algérien, la JSK (Jeunesse sportive kabyle). Il a été arrêté le 28 mai 2024 à Tizi Ouzou (Kabylie) et est retenu en Algérie depuis.

Retour sur la genèse de l’affaire

Christophe Gleizes s’était ren­du une pre­mière fois en Kabylie en 2015 pour men­er une enquête sur le décès, un an plus tôt, dans des cir­con­stances sus­pectes, de l’attaquant camer­ounais de la JSK Albert Ebossé.

En 2024, Christophe Gleizes avait repris con­tact avec un dirigeant du foot­ball kabyle afin de pré­par­er une nou­velle série de reportages sur la JSK, équipe pos­sé­dant un des plus beaux pal­marès du foot­ball algérien, selon Le Monde. Il était entré en Algérie avec un visa touris­tique – au lieu d’un visa jour­nal­is­tique –, ce que lui reproche la jus­tice algéri­enne. Les charges retenues con­tre lui por­tent sur des échanges datant de 2015 et 2017 avec un respon­s­able local du club de Tizi Ouzou : Fehrat Mehen­ni, égale­ment engagé dans le Mou­ve­ment pour l’autodétermination de la Kabylie (MAK), classé comme organ­i­sa­tion ter­ror­iste par Alger en 2021. Un autre mil­i­tant kabyle, Aksel Bellabaci, affirme avoir par­lé avec Christophe Gleizes dans le cadre de son tra­vail journalistique.

En pre­mière instance, la jus­tice algéri­enne avait con­damné le col­lab­o­ra­teur du groupe So Press à sept ans de prison ferme, avec man­dat de dépôt, pour « apolo­gie du ter­ror­isme » et « pos­ses­sion de pub­li­ca­tions dans un but de pro­pa­gande nuisant à l’intérêt nation­al ». Le par­quet avait req­uis dix ans de prison ferme et 500 000 dinars (3 300 euros) d’amende, déclarant : « L’accusé n’est pas venu en Algérie pour accom­plir un tra­vail jour­nal­is­tique mais [pour com­met­tre] un acte hos­tile. » La con­damna­tion à 7 ans de prison ferme a donc été con­fir­mée le 3 décem­bre 2025.

L’espoir d’une grâce présidentielle s’amenuise

Tou­jours selon Le Monde, trois jours avant son procès en appel, le jour­nal­iste sportif était con­fi­ant sur l’issue du procès mais la cour algéri­enne lui a don­né tort. À l’annonce du ver­dict, la mère de Christophe Gleizes et sa famille étaient sous le choc. Dans un entre­tien accordé à RFI, Sylvie Godard, la mère du jour­nal­iste, explique que la jus­tice algéri­enne a même inter­dit à Christophe Gleizes de dis­cuter deux min­utes avec sa famille à l’issue du ver­dict avant qu’il rejoigne le four­gon cellulaire.

Le seul espoir qui sub­siste pour Christophe Gleizes serait qu’Abdelmadjid Teb­boune, le prési­dent algérien, lui accorde une grâce prési­den­tielle, mais cela sem­ble peu prob­a­ble dans l’immédiat. Cepen­dant, selon l’av­o­cat du jour­nal­iste, Emmanuel Daoud, « l’ex­per­tise de son ordi­na­teur n’a rien don­né » et il n’y a « aucune preuve matérielle » attes­tant de « l’ac­cu­sa­tion d’apolo­gie du ter­ror­isme ». Juste avant que la Cour ne se retire pour délibér­er, Christophe Gleizes a dit espér­er « avoir con­va­in­cu ». « Je n’ai jamais eu l’in­ten­tion de nuire et je ne referai plus la même erreur », a‑t-il dit.

Reporters sans frontières et le monde du sport se mobilisent pour Christophe Gleizes

Sor­tant pour une fois de son rôle de com­mis­saire poli­tique de l’information, le directeur général de Reporters sans fron­tières (RSF), Thibaut Brut­tin, s’est dit « choqué » par la déci­sion du tri­bunal algérien. En effet, Christophe Gleizes a écopé de la peine de prison la plus lourde infligée à un jour­nal­iste français depuis dix ans. Thibaut Brut­tin martèle qu’il est « inac­cept­able qu’un de nos conci­toyens qui n’a fait que son tra­vail » soit con­damné à sept ans de prison ferme. Il ajoute en out­re que « l’Algérie est en train de se créer une épine dans le pied qui va être quelque chose qu’elle va traîn­er pen­dant des années si une solu­tion n’est pas trouvée ».

Le monde du sport se mobilise égale­ment pour Christophe Gleizes. Dans un com­mu­niqué sur X, la Ligue de foot­ball pro­fes­sion­nel a annon­cé qu’elle se tient aux côtés du jour­nal­iste sportif et appelle à sa libéra­tion prochaine. À la suite de ce com­mu­niqué, le Paris-Saint-Ger­main annonce sur X rejoin­dre « l’appel de la LFP et de l’ensemble des acteurs du foot­ball pro­fes­sion­nel français en faveur de la libéra­tion de Christophe Gleizes ». Le club du FC Nantes apporte égale­ment son sou­tien au jour­nal­iste. Trente per­son­nal­ités, jour­nal­istes et ex-sportifs, appel­lent en out­re à sa libération.

Une condamnation éminemment politique

Les ten­sions entre Alger et Paris sont crois­santes depuis plusieurs années et Christophe Gleizes a eu le mal­heur de se trou­ver au mau­vais endroit au mau­vais moment ! La crise fran­co-algéri­enne ne risque d’ailleurs pas de s’apaiser puisque l’Algérie organ­i­sait le 30 novem­bre 2025 une con­férence inter­na­tionale sur les crimes du colo­nial­isme afin de faire recon­naître les crimes de l’époque colo­niale et obtenir réparation.

Dans le même temps, les autorités français­es restent très pru­dentes dans leur déc­la­ra­tion. Emmanuel Macron a fait part de sa « pro­fonde inquié­tude » à l’annonce de la con­damna­tion. Le min­istre de l’Intérieur, Lau­rent Nuñez, invité des « 4 Vérités » de France 2, a déclaré : « Nous allons peser de tout notre poids pour obtenir la libéra­tion de Christophe Gleizes. » « Ce sera un élé­ment majeur des dis­cus­sions en cours », a‑t-il ajouté.

De son côté, le Quai d’Orsay, dans un mes­sage jugé tim­o­ré, dit « regret­ter vive­ment la con­fir­ma­tion de la con­damna­tion et déplore que sa pleine coopéra­tion [com­pren­dre Christophe Gleizes] avec les autorités algéri­ennes et les expli­ca­tions fournies par sa défense n’aient pas suf­fi à chang­er le ver­dict ». France Diplo­matie con­clut son mes­sage par ces mots : « La France rap­pelle son attache­ment à la lib­erté de la presse partout dans le monde ».

Cette déc­la­ra­tion arrive au moment où Emmanuel Macron par­lait de labélis­er la presse française… Cha­cun admir­era le paradoxe.

Voir aus­si : Label des médias : Macron rou­vre la boîte de Pan­dore de la « vérité officielle »

L’OJIM se joint à l’appel de Franck Annese, fon­da­teur de So Press et So Foot, afin que Christophe Gleizes retourne en France sain et sauf au plus vite.

Jean-Charles Souli­er

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