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Le projet français « Médias d’intérêt public » : une offensive d’uniformisation internationale

2 novembre 2025

Temps de lecture : 4 minutes
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Le projet français « Médias d’intérêt public » : une offensive d’uniformisation internationale

Temps de lecture : 4 minutes

Le projet français « Médias d’intérêt public » : une offensive d’uniformisation internationale

Sous cou­vert de « prospérité » et de « pro­grès humain », un pan­el d’économistes adoubé par le Forum on Infor­ma­tion and Democ­ra­cy pousse pour instau­r­er tax­es numériques, sub­ven­tions et « poli­tiques indus­trielles de l’information ». Der­rière l’argumentaire tech­nocra­tique, un agen­da d’uniformisation nor­ma­tive, financé par États et fon­da­tions militantes.

Le Forum on Information and Democracy

L’appel dévoilé le 22 sep­tem­bre 2025 présente les « médias d’intérêt pub­lic » comme des « ban­ques cen­trales de l’économie de l’information » et réclame une action publique « déci­sive » : tax­a­tion des plate­formes, fonds nationaux pour le jour­nal­isme, rede­vances, régu­la­tion ren­for­cée. Le cadre est posé par le Forum on Infor­ma­tion and Democ­ra­cy, éma­na­tion du parte­nar­i­at inter­gou­verne­men­tal lancé par la France en 2019. L’information est presque passée inaperçue en France et le média libéral Con­tre­points est un des rares à s’en être fait l’écho.

Un projet de planification informationnelle

Le texte érige l’« infor­ma­tion » en bien pub­lic que le marché ne fourni­rait pas « à la hau­teur » et pro­pose d’« associ­er les marchés à une plan­i­fi­ca­tion intel­li­gente ». Ce vocab­u­laire de poli­tique indus­trielle appliqué aux médias ouvre la voie à une nor­mal­i­sa­tion par l’impôt et la sub­ven­tion, avec un fil­tre d’éligibilité cen­tral­isé. L’architecture est portée par le Forum on Infor­ma­tion and Democ­ra­cy et arrimée à l’IFPIM, fonds mul­ti­latéral présen­té comme bras financier de l’« écosystème ».

Des « économistes » loin d’être neutres

La neu­tral­ité affichée des sig­nataires ne résiste pas à l’examen. Joseph Stiglitz est écon­o­miste en chef et fig­ure de proue du Roo­sevelt Insti­tute, think tank à agen­da « post­néolibéral » et claire­ment pro­gres­siste aux États-Unis. Philippe Aghion a con­seil­lé Emmanuel Macron et soutenu publique­ment sa tra­jec­toire poli­tique et se posi­tionne claire­ment con­tre des par­tis comme le RN ou LFI. Mar­i­ana Maz­zu­ca­to con­seille des gou­verne­ments et des insti­tu­tions alignés sur une relance éta­tique et défend une poli­tique indus­trielle « mis­sion-ori­ent­ed » typ­ique­ment inter­ven­tion­niste. Elle a tra­vail­lé auprès du com­mis­saire européen Car­los Moedas du Par­ti social-démoc­rate por­tu­gais et pour Alexan­dria Oca­sio-Cortez, représen­tante des États-Unis qui se situe à la gauche du Par­ti démocrate.

Le cœur idéologique du pan­el est donc pro-régu­la­tion et pro-sub­ven­tions et penche plutôt à gauche et au cen­tre gauche.
Pour les Français, le rap­port prête à sourire car il est ques­tion d’arroser des médias publics ou privés con­sid­érés comme d’intérêt pub­lic, ce qui est déjà mas­sive­ment le cas à con­sid­ér­er le nom­bre de médias publics en France (8 chaînes télévisées, 6 radios nationales et 44 décli­naisons locales) et les aides à la presse pour les autres médias.

Qui pilote et qui paie ? RSF, Ford, la NED et leurs amis

Le Forum on Infor­ma­tion and Democ­ra­cy est né autour de la très idéologique et sub­ven­tion­née ONG Reporters sans fron­tières pour « met­tre en œuvre » la Déc­la­ra­tion et le Parte­nar­i­at inter­na­tionaux sur l’information et la démoc­ra­tie. Il revendique l’appui de 56 États. Son finance­ment agrège fonds publics et fon­da­tions engagées : Agence française de développe­ment et Quai d’Orsay, Ford Foun­da­tion, Lumi­nate, Future of Life Insti­tute, Nation­al Endow­ment for Democ­ra­cy (NED), fon­da­tions scandinaves.

Voir aus­si : RSF saisit l’ARCOM con­tre CNews pour avoir trop traité le meurtre de Thomas à Crépol

L’International Fund for Pub­lic Inter­est Media (IFPIM) affiche, lui, des bailleurs éta­tiques européens et des géants tech­nologiques via des pro­grammes dédiés. Ce mix pub­lic-privé, très situé poli­tique­ment, réduit la dis­tance avec le pou­voir régu­la­teur qu’il pré­tend « encadrer ».

Le diag­nos­tic d’un marché pub­lic­i­taire cap­té par les plate­formes est con­nu. Mais con­fi­er la « souten­abil­ité » de l’information à une gou­ver­nance inter­na­tionale sub­ven­tion­née fab­rique un risque symétrique : dépen­dance, critères d’orthodoxie et homogénéi­sa­tion édi­to­ri­ale. Quand l’argent vient de l’État et de fon­da­tions à agen­da, la plu­ral­ité s’aplatit, les voix dis­si­dentes se mar­gin­alisent, et la fron­tière entre « intérêt pub­lic » et intérêt du régu­la­teur se brouille.

Voir aus­si : Un dossier sur RSF et un appel à nos lecteurs

Rodolphe Cha­la­mel

Illus­tra­tion : cap­ture d’écran informationdemocracy.org

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