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L’interdiction du film Barbie à Noisy-le-Sec, cas d’école des œillères médiatiques

1 septembre 2025

Temps de lecture : 5 minutes
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L’interdiction du film Barbie à Noisy-le-Sec, cas d’école des œillères médiatiques

Temps de lecture : 5 minutes

L’interdiction du film Barbie à Noisy-le-Sec, cas d’école des œillères médiatiques

En résumé :

  • Annu­la­tion à Noisy-le-Sec : la pro­jec­tion en plein air du film Bar­bie a été annulée sous la pres­sion d’habitants musul­mans invo­quant la religion.
  • Silence médi­a­tique : Libéra­tion, Le Monde, Le Parisien et France 3 évo­quent seule­ment un « groupe de jeunes habi­tants », min­imisant le rôle de l’islam.
  • Deux poids, deux mesures : lorsqu’il s’agit de catholiques, les médias par­lent aus­sitôt d’« inté­gristes », de « rad­i­caux », de « tradis », comme lors des affaires Anna von Hauss­wolff (2021) ou Piss Christ (2011).
  • Stratégie jour­nal­is­tique : min­imiser les pres­sions islamiques présen­tées comme « mineures », tout en ampli­fi­ant sys­té­ma­tique­ment les affaires impli­quant des catholiques ou des Français.
  • Infor­ma­tion sélec­tive : cette dif­férence de traite­ment façonne l’opinion : ce dont on ne par­le pas n’existe pas, ce qu’on grossit devient une men­ace centrale.

Un jour­nal­iste, c’est en principe fait pour informer. Tâche dif­fi­cile, qui impose de dis­cern­er ce qui, dans la masse de don­nées, relève de l’information impor­tante. On ne peut pas tou­jours tax­er les jour­nal­istes de dés­in­for­ma­tion, mais dans cer­tains cas, les oub­lis sont aus­si cri­ants que coupables.

Un film trop woke pour les musulmans

C’est l’été, les Français chanceux par­tent en vacances, et d’autres restent chez eux. Dans les cam­pagnes, ils font des ran­don­nées et inven­tent tant bien que mal de quoi s’occuper pen­dant de longs mois. Dans les villes, notam­ment celles qui relèvent des plans ban­lieues, les sub­ven­tions per­me­t­tent de pro­pos­er cer­taines activ­ités, notam­ment une : le ciné­ma en plein air. On vient en famille, on étend une nappe par terre et des chais­es pli­antes, on s’installe et on regarde un film tout pub­lic. C’est gra­tu­it, agréable et facile. Noisy-le-Sec avait décidé, après con­sul­ta­tion de ses habi­tants, de pro­jeter le film Bar­bie.

Nous ne défendrons pas le film Bar­bie comme un mon­u­ment du ciné­ma, d’une part parce que nous ne l’avons pas vu, d’autre part parce que ce n’est pas le por­trait qu’en brossent les cri­tiques, du moins celles qui ne se proster­nent pas devant la morale fémin­iste et pro­gres­siste. Noisy-le-Sec et ses habi­tants ont toute­fois bien le droit de pro­jeter ce qu’ils veu­lent. La phrase vous sem­ble enfon­cer des portes ouvertes ? Eh bien, pour une cer­taine par­tie de la pop­u­la­tion de Noisy-le-Sec, ville large­ment rem­placée, Bar­bie n’a pas droit de cité. Cer­tains habi­tants, au nom de l’islam, ont donc fait annuler la diffusion.

La charia s’installe, les médias se taisent

L’affaire a évidem­ment fait couler de l’encre dans les médias. Mais une encre curieuse­ment fil­trée. Libéra­tion en par­le, évo­quant « des pres­sions » ou une déci­sion prise « pour éviter que les agents de la ville chargés de l’installation ne soient agressés ». Le tout n’en restera pas là puisque « l’élu assure qu’il va porter plainte ». Con­tre qui ? Mys­tère. Libé pré­cise pour­tant – en légende, texte rarement lu – que « le film Bar­bie avait été cen­suré dans de nom­breux pays ». Tou­jours pas le moin­dre indice donc, sur les respon­s­ables du retrait du film. Il s’agit d’un « petit groupe d’une quin­zaine d’habitants », de « censeurs ». On finit tout de même par appren­dre que les men­aces traduisent « l’obscurantisme et le fon­da­men­tal­isme », et finale­ment que le film a été « cen­suré au Koweït, en Algérie ou au Liban ».

Bref, cir­culez, il n’y a rien à voir. Le Monde n’agit pas autrement, évo­quant « une dizaine de jeunes hommes », « un groupe de jeunes habi­tants ». Il cite tout de même les hommes en ques­tion, qui affir­ment que leur rejet « n’a rien à voir avec l’islam ou la reli­gion ». C’est ain­si que l’on apprend, à grand-peine, que les respon­s­ables du retrait du film Bar­bie sont musul­mans. Le Parisien, tout comme France 3 Régions, donne égale­ment dans la dis­cré­tion en par­lant d’un « groupe de jeunes habi­tants » et en citant presque à con­trecœur les habi­tants évo­quant l’islam.

« Groupe d’habitants » versus « catholiques intégristes »

Les médias rivalisent donc d’ingéniosité pour ne pas informer, pour éviter d’admettre qu’à Noisy-le-Sec, la pro­jec­tion d’un film a dû être annulée à cause de pres­sions islamiques. On n’observe pour­tant pas une telle dis­cré­tion face à d’autres reli­gions. En décem­bre 2021, la musi­ci­enne Anna von Hauss­wolff, con­nue pour ses morceaux joués sur des orgues, devait se pro­duire dans une église nan­taise. Or, cer­tains paroissiens avaient, à l’écoute de ses chan­sons, trou­vé que cer­taines phras­es flir­taient avec le satanisme. Le soir du con­cert, cer­tains s’étaient enfer­més dans l’église, d’autres avaient for­mé un groupe de prière à l’extérieur, devant la porte, et le spec­ta­cle avait dû être annulé.

Ici, nul besoin de fouiller jusqu’à la fin des arti­cles pour trou­ver men­tion des coupables. Les titres suff­isent. Mar­i­anne évoque des « catholiques rad­i­caux », France Bleu des « inté­gristes », Ouest-France, BFM TV et France info des « catholiques inté­gristes », Libé par­le dans son cha­peau de « cathos tradis ». Si les médias avan­cent aujourd’hui à vis­age par­ti­c­ulière­ment décou­vert, leur façon de procéder n’a rien de bien neuf. En 2011, des catholiques avaient van­dal­isé une œuvre d’art inti­t­ulée « Immer­sion, Piss Christ », où un cru­ci­fix était immergé dans de l’urine. Le Monde avait pris soin de point­er des « catholiques inté­gristes », ain­si qu’un cer­tain nom­bre d’associations catholiques telles que Civ­i­tas ou le Salon beige, un « blog intégriste ».

L’information à deux vitesses n’est pas un complot, c’est une tactique

Au fond, la stratégie de cer­tains jour­nal­istes est assez limpi­de. D’abord, laiss­er sous le tapis les méfaits « mineurs » imputa­bles aux musul­mans. L’interdiction d’un film où, finale­ment, per­son­ne n’a été agressé. Un vol sans vio­lence. Une agres­sion sans meurtre. La liste est longue, et les méfaits oubliés de plus en plus graves, puisque chaque semaine apporte son lot d’horreurs. Ensuite, lorsque les affaires vien­nent d’autres caté­gories, de préférence les Blancs, les Français, les catholiques, mon­ter le tout en épin­gle. Pour mon­tr­er que cela existe, que les catholiques sont tout aus­si dan­gereux que les musul­mans, voire plus. Ce dont on ne par­le pas n’existe pas, c’est bien con­nu. C’est juste un sen­ti­ment, comme l’insécurité.

Adélaïde Motte

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