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La gauche européenne s’engage contre l’immigration, le narratif médiatique vacille

15 décembre 2025

Temps de lecture : 5 minutes
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La gauche européenne s’engage contre l’immigration, le narratif médiatique vacille

Temps de lecture : 5 minutes

La gauche européenne s’engage contre l’immigration, le narratif médiatique vacille

Tout com­mence avec une tri­bune. Celle que Keir Starmer, Pre­mier min­istre bri­tan­nique, et Mette Fred­erik­sen, Pre­mière min­istre danoise, ont pub­liée dans The Guardian pour deman­der une mod­erni­sa­tion de la Con­ven­tion européenne des droits de l’homme (CEDH). Pourquoi ? Pour lut­ter con­tre l’immigration illé­gale. Or, Starmer et Fred­erik­sen sont de gauche. Autrement dit, le nar­ratif médi­a­tique prend l’eau, et com­mence à couler.

Touche pas à ma CEDH

Face à cette offen­sive, l’un des pre­miers objec­tifs des médias est de dépein­dre la CEDH comme un garde-fou indis­pens­able pour qui ne veut pas som­br­er dans un monde digne des heures les plus som­bres. Le Parisien, Le Monde et L’Ex­press expliquent qu’elle « garan­tit le respect des lib­ertés fon­da­men­tales ». Sans sur­prise, L’Humanité est encore moins sub­tile et titre : « Du Roy­aume-Uni au Dane­mark, les gou­verne­ments con­ser­va­teurs s’élèvent con­tre les droits fon­da­men­taux des exilés ». Si Keir Starmer et Mette Fred­erik­sen lisaient le français et, ce qui est plus improb­a­ble, L’Humanité, ils seraient sans doute offusqués de se voir qual­i­fiés de conservateurs.

Prendre les armes (médiatiques) face aux attaques

La CEDH est donc un texte fon­da­teur, et les médias s’emploient à mon­tr­er qu’il faut le défendre con­tre un dan­ger immi­nent. Le Monde par­le ain­si des « attaques con­tre la CEDH » et Ouest-France prévient que le Roy­aume-Uni « tente d’affaiblir » ce texte. Le Monde pub­lie égale­ment une inter­view avec Peg­gy Ducoulom­bier, pro­fesseur de droit pub­lic et « l’une des meilleures spé­cial­istes de l’institution ». Selon elle, la CEDH « nous pro­tège tous » et il est « dan­gereux » de l’affaiblir, et même de le vouloir. Ouest-France n’est pas en reste pour ce qui est de ter­ri­fi­er les chau­mières et accuse le Roy­aume-Uni et le Dane­mark de vouloir « restrein­dre son inter­pré­ta­tion des arti­cles sur le droit à la famille et à la pro­tec­tion con­tre la torture ».

De l’illustration des idées nauséabondes

Le jour­nal­isme, c’est aus­si l’illustration. Un arti­cle sans image n’existe pas sur Inter­net, et l’image mar­que presqu’autant que le titre. Le Monde a choisi une pho­to de la police polon­aise pour un arti­cle par­lant d’une réforme de la Cour européenne des droits de l’homme au sujet de l’immigration. Hors sujet, sauf si l’on veut instau­r­er l’idée que l’objectif est de créer des États policiers, voire fas­cistes, puisque les deux mon­des sont per­méables dans le monde de la gauche. Ouest-France est plus clas­sique et se con­tente d’une pho­to peu réussie de la min­istre de l’Intérieur bri­tan­nique, Sha­bana Mah­mood – patronyme par ailleurs peu bri­tan­nique. Gri­mace, cheveux épars au milieu du vis­age, con­tre-plongée, il ne manque qu’un cha­peau noir pour obtenir une affiche pour Halloween.

Gouvernements de gauche, ne cédez pas aux sirènes de l’extrême droite !

Il s’agit égale­ment de main­tenir le dis­cours selon lequel le com­bat con­tre l’immigration est un com­bat d’extrême droite, même si, pour pren­dre le seul exem­ple des Français, les trois quarts s’y recon­nais­sent à présent. Ain­si, Les Echos expliquent que Keir Starmer, chef du gou­verne­ment bri­tan­nique tra­vail­liste – donc classé à gauche, « veut lui aus­si sa poli­tique migra­toire, tout en veil­lant à se dis­tinguer des par­tis pop­ulistes de droite ». Le jour­nal relie d’ailleurs sa tri­bune pub­liée dans The Guardian avec la ren­con­tre de Jor­dan Bardel­la et de Nigel Farage, dirigeant de Reform UK. Le Parisien estime quant à lui que le Pre­mier min­istre est « acculé par les con­ser­va­teurs et Reform UK ». Ouest-France prévient que Keir Starmer a opéré « un virage à droite sur la ques­tion migra­toire » et par­le même d’une « croisade anti-immi­gra­tion ». L’Ex­press et Le Monde sig­na­lent enfin que « la pre­mière min­istre post­fas­ciste Gior­gia Mel­oni » avait déjà remis en cause la CEDH. Radio France s’était à l’époque émue de cette remise en cause en titrant « Migrants : quand l’Europe bascule ».

Un sentiment de submersion migratoire

Cer­tains médias sem­blent même ten­ter de garder, encore un peu, l’illusion que la vague migra­toire ne fait que léch­er les bottes des Européens. Le Parisien et Ouest-France expliquent ain­si que l’un des griefs bri­tan­niques con­tre la CEDH est qu’elle nuit à la lutte con­tre l’immigration illé­gale, qui arrive notam­ment sur de « petits bateaux ». L’Ex­press cite « de nom­breux juristes » qui « ten­tent de remet­tre les chiffres au cœur des dis­cus­sions ». Les chiffres en ques­tion mon­trent que les affaires migra­toires représen­tent une très faible minorité (2%) des requêtes traitées par la CEDH.

La Con­ven­tion européenne des droits de l’homme, c’est un titre pour le moins grandil­o­quent qui aujourd’hui rem­plit très exacte­ment son rôle. Y touch­er, c’est se vouer aux foudres de tous les hommes de bonne volon­té con­quis aux idées des Lumières. L’ennui, c’est que sur l’immigration, cela ne prend plus. Trop de familles sont en deuil, et celles qui ne le sont pas restent sous le choc lorsqu’elles se rap­pel­lent cer­tains faits atro­ces plutôt que divers. Les poli­tiques sont en train, peu à peu, de per­dre du ter­rain, voire de rejoin­dre le camp de l’adversaire, ou de la pop­u­la­tion, et les médias se trou­veront de plus en plus seuls à défendre une sub­mer­sion indéfend­able. Il reste à savoir com­bi­en de temps ils tien­dront avec des élé­ments de lan­gage si grossiers et peu nom­breux qu’ils se retrou­vent d’un arti­cle à l’autre.

Adélaïde Motte

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