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Vaste offensive des médias contre les bloqueurs de publicité

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25 mars 2016

Temps de lecture : 5 minutes
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Vaste offensive des médias contre les bloqueurs de publicité

Temps de lecture : 5 minutes

Depuis le lundi 21 mars 2016, les utilisateurs de bloqueurs de publicité ont pu constater que la plupart des sites d’information les enjoignait, via un message bien visible, à désactiver leur logiciel.

Lancée par le GESTE, une asso­ci­a­tion qui représente les édi­teurs de con­tenus et ser­vices en ligne, cette ini­tia­tive glob­ale entend sen­si­bilis­er les lecteurs au rôle vital de la pub­lic­ité en ligne pour les sites d’in­for­ma­tion. Car depuis plusieurs années, les blo­queurs de pub­lic­ité, le plus con­nu étant AdBlock, ren­con­trent de plus en plus de suc­cès auprès des utilisateurs.

D’après une étude Ipsos datant de début mars, 3 inter­nautes français sur 10 en sont équipés. Un énorme manque à gag­n­er pour des édi­teurs de con­tenus déjà main­tenus en res­pi­ra­tion arti­fi­cielle à grands coups de subventions.

Ain­si, dès lun­di, le site Lequipe.fr affichait une pho­togra­phie des All Blacks accom­pa­g­née de ce mes­sage : « Pour accéder à votre con­tenu mer­ci de dés­ac­tiv­er votre blo­queur de pub­lic­ité. » D’autres sites, comme L’Ex­press, Le Monde, Deez­er, 20 Min­utes, Le Point, Le Parisien, Europe 1 ou encore Marie Claire ont mis en place des sys­tèmes similaires.

Cer­tains, comme Le Monde et L’Obs, affichent un mes­sage rédigé pour l’un par Jérôme Fenoglio (directeur du quo­ti­di­en du soir), pour l’autre par Matthieu Crois­sandeau (directeur de l’heb­do­madaire) pour expli­quer cette démarche aux lecteurs. « Pour per­me­t­tre à nos 400 jour­nal­istes de vous apporter chaque jour une infor­ma­tion de qual­ité, fiable, var­iée, et pour pou­voir con­tin­uer à vous pro­pos­er des ser­vices inno­vants et per­for­mants, nous devons pou­voir compter sur les revenus de la pub­lic­ité », explique ain­si Fenoglio.

Sur L’Obs, Matthieu Crois­sandeau souligne que l’u­til­i­sa­tion d’un blo­queur « men­ace grave­ment le mod­èle économique des médias en ligne ». « Les revenus que nous tirons de la pub­lic­ité nous per­me­t­tent en effet de vous apporter chaque jour une infor­ma­tion de qual­ité ; de financer le tra­vail de nos jour­nal­istes ou les envoy­er en reportage sur le ter­rain ; de vous pro­pos­er de nou­veaux ser­vices, de nou­velles appli­ca­tions, de nou­veaux sites », ajoute-t-il.

De son côté, Le Figaro a choisi de flouter le texte de ses articles.

De son côté, Le Figaro a choisi de flouter le texte de ses arti­cles. Cliquez pour zoomer.

De son côté, Le Figaro a choisi de flouter le texte de ses arti­cles pour les déten­teurs de blo­queur de pub, en ajoutant un mes­sage d’ex­pli­ca­tion. À mesure que votre vis­ite se pour­suit sur le site, si vous n’avez tou­jours pas dés­ac­tivé votre logi­ciel, le texte devient de plus en plus flou, voire illisible.

Pour faire d’une pierre deux coups, cer­tains médias pro­posent même des offres décou­vertes de leurs dif­férents abon­nements. Il revient à cha­cun des sup­ports de décider si, après l’af­fichage de ce mes­sage, l’in­ter­naute peut pour­suiv­re ou non sa nav­i­ga­tion. Sur demande du GESTE, ce dis­posi­tif sera mis en place durant une semaine, mais « cer­tains édi­teurs peu­vent décider de main­tenir le dis­posi­tif plus longtemps », a pré­cisé une porte-parole de l’as­so­ci­a­tion.

Si les édi­teurs et l’as­so­ci­a­tion souhait­ent rap­pel­er « que leurs con­tenus et ser­vices ne sont pas gra­tu­its » et que cette action a pour but de « préserv­er le con­trat de lec­ture avec l’in­ter­naute », d’autres voix se font enten­dre. Sur Numera­ma, Guil­laume Cham­peau estime que cette cam­pagne est « con­tre-pro­duc­tive et se trompe de cible ».

Pour ce dernier, « on peut douter que soit effi­cace le fait de chercher à faire cul­pa­bilis­er l’internaute qui veut juste lire sans être envahi par la pub­lic­ité, et par les traceurs qui visent à peaufin­er un ciblage mar­ket­ing ». De plus, cette ini­tia­tive « aus­si bru­tale que soudaine » aura surtout pour effet de rap­pel­er aux inter­nautes à quel point « les sites qu’ils aiment et qu’ils lisent sont blind­és de pub­lic­ités toutes plus imposantes et intru­sives les unes que les autres ».

Depuis plusieurs années, un cer­cle vicieux s’est instal­lé entre les édi­teurs et les adblocks : « les revenus chutent, donc les édi­teurs affichent davan­tage de pub­lic­ités tou­jours plus vis­i­bles, donc les lecteurs blo­quent davan­tage, donc les revenus chutent… » Désor­mais, l’avenir du web est entre les mains de l’in­ter­naute, estime Numera­ma.

Et de con­clure : « Si l’on veut préserv­er l’idéal d’un inter­net ouvert à tous, fondé sur le libre accès à l’information, il fau­dra accepter de pay­er pour soutenir les sites inter­net qui con­tin­u­ent de pro­pos­er leurs con­tenus gra­tu­ite­ment, via la pub­lic­ité. Sinon les sites se refer­meront pro­gres­sive­ment sur eux-mêmes et l’on ver­ra naître via un pay­wall un Web dis­crim­i­na­toire, où seuls les plus aisés pour­ront s’abonner à la fois au Monde, au Figaro, à l’Équipe, à L’Express, etc., et lire leurs contenus. »

Mais peut-être faudrait-il égale­ment que ces mêmes médias redonnent tout sim­ple­ment envie à leurs lecteurs de les lire…

Rap­pelons enfin que l’Ojim est entière­ment financé par ses lecteurs et n’accepte aucune pub­lic­ité. Il peut donc être con­sulté sans blo­queur de pub­lic­ités… et sans limites.