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Le soldat Blanquer face aux médias de l’Éducation Nationale

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10 février 2018

Temps de lecture : 6 minutes
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Le soldat Blanquer face aux médias de l’Éducation Nationale

Temps de lecture : 6 minutes

Le 9 février 2018, l’hebdomadaire Marianne titrait : « Élève Blanquer, au tableau ! Les réformes du ministre jugées par ceux qui font l’école ». Il est vrai que le ministre de l’Éducation Nationale semble mettre les pieds dans le plat idéologique qu’est devenue l’éducation en France. Pas simple, tant les médias internes de l’Éducation Nationale sont imprégnés de bien-pensance militante, à l’image du « réseau Canopé » par exemple.

Jean-Michel Blan­quer a mis à la porte de son min­istère un ancien directeur des pro­grammes, dont l’activité était essen­tielle­ment mar­quée par le mil­i­tan­tisme en faveur de tout ce qui peut nier la réal­ité des racines et de l’identité, pro­mou­vant idéolo­gie du genre ou réécri­t­ure des pro­grammes, par­ti­c­ulière­ment en ce qui con­cerne cette matière sen­si­ble qu’est l’Histoire, à l’aune de la « reli­gion poli­tique mul­ti­cul­turelle » épinglée par l’essayiste et soci­o­logue Math­ieu Bock-Côté. Il a aus­si nom­mé des sci­en­tifiques à la place des mil­i­tants. Cela suf­fi­ra-t-il ? L’arsenal idéologique interne à l’Éducation Nationale, auquel le min­istre sem­ble vouloir s’attaquer, paraît bien massif.

Qui s’étonne que l’école fonctionne mal ?

Ce qui est sur­prenant n’est pas que l’école fonc­tionne mal mais de s’en éton­ner. Depuis la fin du 20e siè­cle et la main­mise cul­turelle et idéologique sur l’école par la gauche poli­tique, dev­enue gauche sociale-démoc­rate et libérale-lib­er­taire, le rôle dévolu à l’école n’est plus pri­or­i­taire­ment d’instruire ou d’éduquer mais de con­stru­ire un futur adulte pen­sant cor­recte­ment. Autrement dit, un indi­vidu con­sid­érant que le Bien se décline en mul­ti­cul­tur­al­isme, défense des iden­tités non blanch­es, néga­tion de cette dernière ain­si que des racines de l’Europe, pro­mo­tion du genre sous cou­vert d’égalité entre hommes et femmes, écri­t­ure inclu­sive, pro­mo­tion des cul­tures extérieures à l’Europe, val­ori­sa­tion de la cul­ture musul­mane, com­bat con­tre le chris­tian­isme… La réal­ité réécrite selon le bon vouloir mil­i­tant de l’idéologie au pou­voir en somme. La palme de la car­i­ca­ture en ce domaine revenant sans doute à des manuels de pri­maire rem­plaçant le mot « bar­bares » (pour­tant employé par les romains pour désign­er ceux qui ne par­laient pas le latin et com­bat­taient leur civil­i­sa­tion) par « migrants », les Ger­mains devenant ain­si des pop­u­la­tions migrantes venant s’installer sur le ter­ri­toire antique cor­re­spon­dant à la France actuelle. Ou bien à ces manuels d’éducation civique, de pri­maire aus­si, pointant du doigt l’homme blanc occi­den­tal, raciste comme par essence parce que n’étant pas assez fin intel­lectuelle­ment pour com­pren­dre que le mul­ti­cul­tur­al­isme serait l’avenir de l’Homme. De la même manière, les manuels d’Histoire du sec­ondaire mélan­gent con­cep­tions binaires (esclavagistes blancs européens ver­sus vic­times africaines noires par exem­ple) et bien­veil­lance vis-à-vis d’un Islam avant tout présen­té comme reli­gion de paix, un angle qui n’est pas anodin dans le con­texte ter­ror­iste actuel. Out­re les manuels mis entre les mains des enfants et des ado­les­cents, les médias de pro­pa­gande idéologique ne man­quent pas au sein de l’Éducation Nationale, à l’image de la chaîne dédiée Francetv édu­ca­tion, à laque­lle l’Observatoire du jour­nal­isme con­sacrait une enquête en févri­er 2017. Le dernier en date à con­naître une forte crois­sance s’appelle le « réseau Canopé », mod­erni­sa­tion et dépous­siérage par le biais d’internet des anciens CRDP (Cen­tres de recherche et de doc­u­men­ta­tion pédagogique).

Avec Canopé, c’est la lutte finale à tous les étages

Si l’école fonc­tionne mal, il y a sans doute bien des caus­es. L’idéologie en est une, sauf qu’elle n’est la plu­part du temps pas con­sid­érée comme telle. Pour­tant, les par­ents ayant des reje­tons sco­lar­isés le savent tous, même ceux qui sont en accord avec l’idéologie cul­turelle dom­i­nante. Nom­bre d’entre eux ne met­tent pas leurs enfants dans l’école publique ou bien obti­en­nent qu’ils soient affec­tés dans des étab­lisse­ments pro­tégés et sécurisés, sans doute au nom de l’égalité répub­li­caine. Aujourd’hui, réus­sir à l’école passe autant par l’acquisition de savoirs et de com­pé­tences que par une sorte de soumis­sion à la pen­sée dom­i­nante. C’est à la mise en œuvre de cette pen­sée idéologique dom­i­nante que ser­vent la plu­part médias de l’Éducation Nationale, manuels sco­laires ou chaînes de télévi­sion. Ain­si que le « réseau Canopé », sous-titré « Le réseau de créa­tion et d’accompagnement péd­a­gogiques ». De quoi s’agit-il ? D’un réseau de partage de don­nées péd­a­gogiques mis à dis­po­si­tion des per­son­nels de l’Éducation Nationale. En théorie, rien de con­testable : le monde de l’éducation crée, partage, dif­fuse des idées, des pro­jets, des matéri­aux util­is­ables en son sein. Sauf qu’un pan entier des out­ils pro­posés et mis en œuvre par ce réseau vise à réé­du­quer idéologique­ment en per­ma­nence les jeunes Français. Par « la semaine de la presse », par exem­ple, dont l’objet est « d’éduquer aux médias » et de « dévelop­per l’esprit cri­tique » des élèves, autrement dit d’apprendre quels sont les médias fiables (Le Monde par exem­ple, auquel nom­bre d’établissements sco­laires sont abon­nés) et les médias « dou­teux », « com­plo­tistes », auteurs de « fake news »… Autrement dit, tout média offi­cielle­ment classé poli­tique­ment à droite ou non libéral/libertaire. Il s’agit « d’éduquer aux médias », sachant que dans l’esprit de la majeure par­tie du monde enseignant des mag­a­zines comme Mar­i­anne ou Valeurs Actuelles sont à un niveau élevé sur l’échelle de l’axe du Mal. C’est ain­si que tous les étab­lisse­ments sco­laires reçoivent des jour­naux sélec­tion­nés avec atten­tion durant une semaine.

Canopé lutte contre les discriminations

C’est cela que l’Éducation Nationale appelle édu­quer : appren­dre aux jeunes sco­lar­isés quels sont les médias qui pensent bien. Mais aus­si lut­ter con­tre les « dis­crim­i­na­tions » et en faveur du « vivre ensem­ble » mul­ti­cul­tur­al­iste. C’est ain­si que le « Réseau Canopé » lance une « Grande mobil­i­sa­tion de l’école pour les valeurs de la République », mobil­i­sa­tion per­ma­nente en réal­ité. Ceci, sans que quiconque dans les médias offi­ciels ne paraisse trou­ver saugrenu qu’un sys­tème sco­laire soit mobil­isé en faveur d’un mode de pen­sée et d’un sys­tème poli­tique spé­ci­fique. En France. Quand il s’agit d’autres pays, comme la Pologne, la mon­tée au créneau se fait plus vite. Un élé­ment de cette « mobil­i­sa­tion » générale est annon­cé pour bien­tôt : « La Semaine d’éducation et d’actions con­tre le racisme et l’antisémitisme se déroulera du 19 au 25 mars 2018. L’occasion de pro­mou­voir les valeurs et principes fon­da­men­taux de la République à l’école. Laïc­ité, lib­erté de con­science, respect des êtres humains, etc., autant de notions à étudi­er pour lut­ter con­tre la haine et l’intolérance ». Cette semaine d’actions est inti­t­ulée « édu­quer con­tre le racisme et l’antisémitisme ». Le min­istère met à dis­po­si­tion un site dédié, pro­posant de mul­ti­ples ressources, dont qua­tre vidéos « si on fai­sait le point ? » des­tinées à met­tre les enseignants sur les bons rails con­cer­nant « la dis­crim­i­na­tion, le métis­sage, le fas­cisme et l’intégration ».

Il en va ain­si dans l’actuelle Édu­ca­tion Nationale : édu­quer aux valeurs de la République sig­ni­fie reli­er fas­cisme, dis­crim­i­na­tion, métis­sage et inté­gra­tion. Le Mal iden­ti­taire (fascisme/discrimination) face au Bien libéral lib­er­taire (métissage/intégration). Avec ce genre de médias internes, qui peut encore s’étonner que l’école fonc­tionne si mal ? Du moins en ce qui ce qui con­cerne son rôle théorique, soit instru­ire, édu­quer et trans­met­tre des racines communes.