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Dossier : « Radio-Paris » souffre au réveil, la matinale de France Inter début 2015

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20 janvier 2015

Temps de lecture : 25 minutes
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Dossier : « Radio-Paris » souffre au réveil, la matinale de France Inter début 2015

Temps de lecture : 25 minutes

De Hollande à Charlie en passant par Houellebecq, la rentrée de la matinale de France Inter se trouva particulièrement chargée et férocement déroutante. L’OJIM s’est attelé, la semaine du 5 janvier, à l’écoute studieuse de ces deux heures animées chaque matin par Patrick Cohen, deux heures qui donnent le ton à la « Pensée Unique » en cumulant les qualités pour ce faire : émission d’une radio d’État, d’une radio de gauche, d’une radio dominante, régnant (de peu) sur la tranche horaire la plus écoutée de ce type de média.

« Radio-Paris » du troisième mil­lé­naire pour son côté insti­tu­tion­nel et pro­pa­gan­diste décom­plexé divul­gué par une armée de jour­nal­istes dont le panora­ma paraît her­mé­tique­ment bouclé par le périphérique, France Inter, dans sa mati­nale, donne toutes les clés pour com­pren­dre le monde selon l’ « Empire du Bien ». Les plus grandes fig­ures de l’actualité ne man­quent pas de venir se faire inter­view­er durant cette émis­sion où les faits impor­tants à retenir sont détail­lés au long de trois jour­naux (7h, 7h30 et 8h). La météo et le « point route » com­plè­tent à mer­veille ce kit de survie en ter­ri­toire bobo, alors même que l’auditeur aura été par­faite­ment imprégné par le cli­mat men­tal qu’il est cen­sé adopter pour avancer au mieux sur l’autoroute des clichés bien-pen­sants. Le catéchisme du jour lui aura été déclamé par des édi­to­ri­al­istes faisant fig­ure de gar­di­ens de la foi aus­si intran­sigeants qu’invariables, suff­isants, pom­peux et dog­ma­tiques, et les arti­cles prin­ci­paux de sa croy­ance lui auront même été rabâchés sur d’autres portées, grâce à l’intervention en chaire de comiques dont l’humour s’est depuis longtemps désagrégé sous l’éteignoir du pen­sum. Cette artillerie lourde du poli­tique­ment cor­rect allait cepen­dant subir, en cette pre­mière semaine de l’an 2015, de très vio­lents assauts. On crût d’abord que l’événement de cette reprise serait la fade appari­tion d’un prési­dent-fan­tôme, le lun­di 5 jan­vi­er, dont le car­ac­tère excep­tion­nel ne tenait qu’au statut offi­ciel de l’invité. Mais après une séquence aux forts relents de malaise face à Michel Houelle­becq, le 7, invité que France Inter n’eût pu se per­me­t­tre de boud­er en rai­son de sa notoriété, ce fut bien évidem­ment le mas­sacre des jour­nal­istes de Char­lie Heb­do qui serait la funèbre « sen­sa­tion » et l’authentique trau­ma­tisme de cette semaine ; un événe­ment qui boulever­sa la France entière et qui représen­ta plusieurs très sérieuses raisons de remet­tre en cause le prêt-à-penser de la radio. Au lieu de quoi, le moin­dre élé­ment en rap­port avec ces atten­tats ren­força encore davan­tage la foi de nos prêcheurs de l’aube, sur­mon­tant toute con­tra­dic­tion par la grâce d’un aveu­gle­ment des plus définitifs.

Économie d’une matinale

Sur cette tranche horaire cri­tique, la pre­mière sta­tion du ser­vice pub­lic pro­pose un pro­gramme très dense au rythme ser­ré con­sti­tué d’une suite de brèves séquences envi­ron­nant les points actu­al­ité de la mat­inée, le tout orchestré par la voix à la fois suave et rauque de Patrick Cohen. Les jour­naux d’Hélène Fily (7h), d’Hélène Rous­sel (7h30) et de Mick­aël Thébault (8h), s’étendent cha­cun sur une quin­zaine de min­utes, présen­tent les mêmes titres, mais intè­grent des reportages ou des « zooms » sur des points dif­férents. La pre­mière heure (7h-8h) est plus cal­i­brée et chargée que la sec­onde ; y inter­vi­en­nent les écon­o­mistes Dominique Seux et Philippe Lefébu­re ; l’éditorialiste poli­tique Thomas Legrand ain­si que la nou­velle inter­vieweuse star Léa Salamé. Après le jour­nal de 8h, c’est Bernard Guet­ta qui assure une chronique poli­tique dont les ori­en­ta­tions ne dif­fèrent guère de celles de son col­lègue Thomas Legrand. À 8h30, Bruno Duvic tient une revue de presse, et ce sont les audi­teurs de France Inter, en général aus­si stéréo­typés que les pro­pos dont ils s’abreuvent, qui inter­vi­en­nent lors d’une inter­view ouverte, laque­lle est encore élargie quand Hélène Rous­sel rap­porte des réflex­ions issues des réseaux soci­aux. Cha­cune de ces heures pré­tend s’achever avec davan­tage de légèreté par l’intervention d’un humoriste. Char­line Van­hoe­nack­er fait ain­si la tran­si­tion avec le jour­nal de 8h, tan­dis que celle précé­dant le point actu de 9h est assurée par Sophia Aram le lun­di et le jeu­di, François Rolin le mar­di, Nicole Fer­roni le mer­cre­di, et enfin François Morel le ven­dre­di. Tous ces comiques com­mentent à leur manière un sujet d’actualité, et il n’y a donc que Rebec­ca Man­zoni, à 7h24 chaque matin, qui pro­jette quelques min­utes l’auditeur hors de l’info brute à la faveur de sa séquence « Pop & Co », un vrai moment de sub­til­ité, d’insolite et d’élégance qui tranche assez franche­ment avec ce rouleau com­presseur qui, comme nous l’évoquions en préam­bule, aplan­it toute la matière de l’actualité afin qu’y cir­cule au mieux une idéolo­gie stricte­ment formatée.

France Inter vs Hollande

Ce qui devait donc être, à l’origine, « l’événement médi­a­tique » de cette ren­trée 2015, c’était la venue du prési­dent de la République lui-même pour les deux heures de la mati­nale, le lun­di 5 jan­vi­er. Cette inter­ven­tion s’inscrivait dans la démarche de recon­quête des suf­frages par des pris­es de parole de prox­im­ité qu’envisageait le prési­dent le moins pop­u­laire de la Vème République depuis quelques semaines. Alors certes, venir se faire cuisin­er de grand matin à la radio n’allait pas rehauss­er la sou­veraineté prési­den­tielle, mais d’abord, au point où elle avait été abais­sée, sans doute Hol­lande avait-il de la marge, et ensuite, le choix de France Inter ne le met­tait guère en dan­ger : le prési­dent serait en famille, ne risquait pas de se faire trop chahuter, et pour­rait ain­si ten­ter de com­mencer par recon­quérir son pro­pre camp. France Inter allait donc, pour l’occasion, faire vrai­ment fig­ure de radio du pou­voir. Or, ce qui rend la radio éli­gi­ble à ce poste, c’est, comme nous l’avons dit, son respect scrupuleux et intran­sigeant de la Bien-Pen­sance, au point où le réel doit en per­ma­nence servir l’idéologie et ce lun­di, la case « fan­tasme du retour du fas­cisme autorisant l’homme de gauche à se grimer en résis­tant et à se com­porter en stal­in­ien » allait être rem­plie à l’aide d’une anec­dote sor­dide mon­tée en épin­gle. Le refus par le maire « divers droite » Chris­t­ian Leclerc de l’inhumation d’un bébé rom dans le vil­lage de Cham­plan (Essonne) allait faire le titre prin­ci­pal des divers­es édi­tions du jour­nal, et dans celle de 7h30, on apprendrait qu’ « en deux jours, c’est devenu comme le sym­bole de la dis­crim­i­na­tion. » Pour­tant, si ce fait méri­tait bien sûr d’être à la fois rap­porté et con­damné, on apprend ce lun­di que Chris­t­ian Leclerc se con­fond désor­mais en excus­es, insiste pour que le bébé soit inhumé dans sa com­mune (sa dépouille a été recueil­lie dans une com­mune voi­sine dont le maire peut se tar­guer de pass­er main­tenant pour le Jean Moulin local…) Bref, on com­prend qu’un cafouil­lage admin­is­tratif aux con­séquences odieuses mais brèves laisse un maire, bat­tant pour­tant sa coulpe en pub­lic, en proie à un lyn­chage orchestré par les médias et les asso­ci­a­tions antiracistes, et que ce fait, désor­mais éclair­ci et résolu, est cepen­dant hissé en Une par de nom­breux médias dont France Inter afin que soit dénon­cé avec la plus grande sévérité le racisme intrin­sèque que l’on soupçonne chaque jour dans la pop­u­la­tion autochtone.

L’interview molle

Pour cette mati­nale spé­ciale, la plu­part des chroniqueurs va donc par­ticiper à cette entre­vue avec le prési­dent plutôt que de don­ner les chroniques habituelles. Mais les jour­nal­istes ont beau s’y met­tre à une petite dizaine, l’interview reste aus­si molle que l’attitude générale du prési­dent nor­mal. La pre­mière par­tie con­fronte Hol­lande aux écon­o­mistes Lefébu­re et Seux. Le prési­dent, tout en affir­mant que la « loi Macron » n’est pas « la loi du siè­cle », comme s’il s’agissait de la rel­a­tivis­er pour ne pas trop ulcér­er son élec­torat, expose sa soumis­sion totale aux logiques libérales, lesquelles se trou­vent en effet inélucta­bles dans le cadre européen. L’obsession de la crois­sance et donc de la relance économique par une com­péti­tiv­ité accrue et d’autant plus exigeante dans l’espace de libre con­cur­rence auquel la France se trou­ve inté­grée, pousse le gou­verne­ment à tout faire pour « stim­uler l’activité », y com­pris ren­dre pos­si­ble le tra­vail le dimanche, ce que Sarkozy n’était pas par­venu à impos­er. Cette soumis­sion totale de la gauche de gou­verne­ment au Marché, Patrick Cohen la relève au moins ironique­ment lorsqu’il rap­pelle une phrase pronon­cée par le can­di­dat Hol­lande lors du fameux dis­cours du Bour­get : « L’Histoire n’est pas l’addition de fatal­ités suc­ces­sives… », deman­dant ensuite au prési­dent s’il con­sid­ère avoir fait de bons choix, et surtout des choix « de gauche ». Mais François Hol­lande se défausse sys­té­ma­tique­ment par la langue de bois, l’emploi de périphrases creuses ou de notions générales à l’application très floue (les mots « pro­grès » et « égal­ité » sont agités une bonne dizaine de fois à tort et à tra­vers – tout cela est vide, mais le jour­nal­iste bien-pen­sant sem­ble s’en trou­ver immé­di­ate­ment ébloui). Thomas Legrand et Léa Salamé ten­teront de revenir sur cette réori­en­ta­tion poli­tique, sans pou­voir tir­er grand chose d’autre que des feintes et des esquives. Léa Salamé sera la seule, cepen­dant, à pos­er des ques­tions fon­da­men­tales et per­ti­nentes, comme lorsqu’elle voudra faire remar­quer à Hol­lande que les fron­tières droite-gauche explosent et qu’une par­tie de la droite a applau­di aux dernières mesures de son gou­verne­ment (tou­jours le même con­stat de la soumis­sion au libéralisme).

Le virage vert

L’impression que don­nera Hol­lande, même si cet aspect ne sera mal­heureuse­ment pas relevé par ses inter­locu­teurs, c’est que l’écologie est en passe de devenir une cause de sub­sti­tu­tion pour une gauche défini­tive­ment alignée sur le libéral­isme. Après avoir rem­placé le pro­lé­taire par l’immigré lors du virage libéral de 83 ; il se pour­rait que la gauche rem­place l’immigré par la planète en 2015, en tant que cau­tion morale suprême. « L’Europe, ce doit être notre pro­tec­tion. », répon­dra le prési­dent face à Bernard Guet­ta et Luc Lemonier, inter­rogé sur les ques­tions inter­na­tionales après le jour­nal de 8h, lors même que c’est l’Europe qui nous a livrés pieds et poings liés au néo-libéral­isme comme aux nou­veaux assauts migra­toires depuis plusieurs années. Donc, il faut badi­geon­ner de vert la trahi­son et nour­rir le « légendaire pro­gres­siste » auquel la gauche car­bu­re. Non seule­ment, Hol­lande revient à plusieurs repris­es sur cette pri­or­ité don­née à l’écologie, mais il répond — à une auditrice qui l’interroge sur la taxe Tobin — que les béné­fices recueil­lis par celle-ci devraient être mis « au ser­vice du cli­mat ». Ensuite, Hol­lande joue de lyrisme au sujet de la con­férence sur le cli­mat qui aura lieu cette année à Paris, évo­quant le bel enjeu que cela représen­terait pour la France en « montr(ant) que c’est à Paris, encore une fois, que les droits humains vont être pronon­cés ! » Bien sûr, l’emphase dérape dans l’absurde puisqu’on ne voit pas le rap­port entre les gaz à effet de serre et les « droits humains », mais ce déra­page trahit ô com­bi­en com­ment Hol­lande espère inve­stir cette lutte écologique de tout le pathos con­quérant que la gauche a tou­jours alloué à ce qui lui sem­blait, à tort ou à rai­son, comme rel­e­vant du sacro-saint « Pro­grès ». Der­rière les tré­mo­los, cepen­dant, cette « nou­velle lutte » fait ressor­tir immé­di­ate­ment un nom­bre impor­tant de con­tra­dic­tions que per­son­ne n’a été en mesure de relever dans le stu­dio radio­phonique. Tout d’abord, que la ques­tion écologique, posée sérieuse­ment, implique de remet­tre en cause les dogmes néo-libéraux aux­quels sac­ri­fie la gauche élo­quem­ment avec la loi Macron, et leur tyran­nie de la crois­sance. Ensuite que la ques­tion écologique, si elle est posée de manière cohérente et générale, ne peut faire l’économie d’une « écolo­gie humaine », comme d’une « écolo­gie des civil­i­sa­tions » ain­si que la défend l’économiste Hervé Juvin. C’est-à-dire qu’on ne peut pas vouloir préserv­er la diver­sité des espèces ani­males et refuser l’exploitation à out­rance de l’environnement d’un côté, tout en assur­ant, de l’autre, la liq­ui­da­tion de la cul­ture française autochtone par l’invasion migra­toire et l’exploitation des embryons humains que pré­fig­ure la loi Taubira.

La France selon Hollande

Mais le plus remar­quable, dans le dis­cours de Hol­lande, en dehors du fait qu’il brade tout au libéral­isme économique sans même en tir­er la prospérité, c’est la vision que ce prési­dent français a de la France. Une vision totale­ment abstraite et par­tiale, com­plète­ment fausse, idéologique et util­i­taire, mais partagée par la plu­part des élites parisi­ennes et par l’intégralité des chroniqueurs de la mati­nale qui, pour cette rai­son, ne se ren­dent même pas compte du tour de passe-passe grossier qu’effectue le chef de l’État. Hol­lande revient à plusieurs repris­es, tout au long de l’émission, sur le même syl­lo­gisme. La pre­mière fois qu’il l’emploie, c’est parce que Salamé pose une ques­tion majeure que per­son­ne d’autre n’a l’idée de pos­er à France Inter, une ques­tion qui touche à la crise iden­ti­taire que tra­verse le pays. « Oui, et elle pèse lour­de­ment. », répond alors le prési­dent, don­nant donc dans un pre­mier temps l’impression de pren­dre en compte la souf­france iden­ti­taire que vit une par­tie impor­tante des Français et qu’ont pu soulign­er autant cer­tains écrivains (dia­bolisés pour l’avoir fait), l’auteur du Sui­cide français que le soci­o­logue Christophe Guil­luy. Mais c’est alors qu’a lieu la pres­tidig­i­ta­tion : « Il faut avoir la pen­sée ferme et garder sa con­vic­tion répub­li­caine… », con­vic­tion à laque­lle s’oppose le fait de « s’en pren­dre à l’autre » comme dans cette his­toire d’inhumation refusée, que nous avons évo­quée plus haut, et qu’Hollande s’empresse donc d’utiliser poli­tique­ment. Le tour est rejoué un peu plus tard : « Nous par­lions tout à l’heure de l’identité de la France qui est à chaque fois mise en cause lorsqu’il y a des peurs… ». Enfin, répon­dant à un audi­teur à la fin de la mati­nale, Hol­lande reprend son syl­lo­gisme : « Des forces extrêmes qui por­tent atteinte à nos valeurs et font que la France ne serait plus la France. » La France donc, pour son prési­dent actuel, ne recou­vre aucun peu­ple pré­cis, ne porte pas la traîne glo­rieuse de 1500 ans d’Histoire, n’a ni fron­tières ni paysages ni vis­age ni sang ni biogra­phie, ne dis­pose d’aucune chair, en somme, mais se résume à une pure abstrac­tion, une ques­tion de « valeurs », des valeurs « répub­li­caines » (impli­quant que la France n’existait pas avant 1789), et des valeurs répub­li­caines qui cepen­dant n’ont rien à voir avec celles des pre­miers pro­mo­teurs de la République – si nation­al­istes -, ni avec celles des sec­onds – si impéri­al­istes -, mais avec SCALP et Ras-le-front, en fait, avec la vig­i­lance antifa résis­tant au fas­cisme un demi siè­cle après la mort du fas­cisme, alors voilà donc le syl­lo­gisme : la France, c’est la République et la République réelle, c’est la gauche mod­erne. La France, c’est Hol­lande et ses potes, et il est leur prési­dent. Ceux qui souf­frent, donc, de la destruc­tion pro­gres­sive de l’identité française, non seule­ment ne sont pas pris au sérieux par le prési­dent, mais de sur­croît, celui-ci leur dénie même la « francité » qu’il leur reste.

Débriefing stérile

Les potes de Hol­lande, ce sont juste­ment les jour­nal­istes de France Inter, comme le men­tionne d’ailleurs Sophia Aram dans sa chronique. Et ils sont tout aus­si inca­pables d’attaquer leur prési­dent, que de faire un débrief­ing sérieux de l’interview le lende­main. Ils réfléchissent telle­ment selon les mêmes petits par­a­digmes étroits, ceux qui définis­sent sans doute, selon Patrick Cohen, un « cerveau sain », qu’ils sont inca­pables de réa­gir à ses pro­pos ou de les met­tre en per­spec­tive, ne met­tant en cause que l’absence de résul­tats observée sur le plan économique. Est-ce donc pour venir à la rescousse de leur faib­lesse cri­tique que Nathalie Kosciusko-Morizet sera, le 6 jan­vi­er, l’invitée de Patrick Cohen, cen­sée exprimer la com­bat­iv­ité de l’ « oppo­si­tion » ? Mais de l’opposition à quoi ? Hormis le fait que l’élue UMP ne plaît pas aux audi­teurs de France Inter, ce qu’elle pré­conise va exacte­ment dans le même sens que François Hol­lande et on l’entend sur-jouer un rap­port con­flictuel pour ton­ner qu’il fal­lait davan­tage que douze dimanch­es où l’on pût tra­vailler ou que la loi Macron ne va pas assez loin, même si elle va plus loin que ce que les gou­verne­ments précé­dents aux­quels elle apparte­nait avaient réal­isé. Rien ne la choque dans la vision de la France que divulgue celui qui est cen­sé l’incarner et elle prou­ve très explicite­ment cette course de relais pour bâtir le même monde libéral-lib­er­taire présen­tée fal­lac­i­euse­ment comme un duel, cette col­lab­o­ra­tion effec­tive entre libéraux de droite et de gauche que dénonce le philosophe Jean-Claude Michéa, mais que les jour­nal­istes de France Inter, blo­qués dans des cli­vages caduques depuis deux décen­nies, n’ont tou­jours pas élu­cidée. Quant à s’opposer aux manip­u­la­tions médi­a­tiques, il faut croire que NKM n’en a pas non plus les moyens intel­lectuels, aus­si, quand on l’interroge sur cette his­toire de bébé rom, au lieu de dénon­cer l’exploitation d’une affaire qui n’en fut pas vrai­ment une, la numéro 2 de l’UMP apporte docile­ment sa con­tri­bu­tion lacry­male en s’exclamant : « C’était juste insup­port­able, comme une deux­ième mort ! » Elle refuse de rire, en revanche, avec François Rolin qui sign­era la seule chronique vrai­ment drôle de la semaine (et pour­tant Dieu sait si les médias con­tem­po­rains ont de comiques à leur bord), en ridi­culisant la médi­ocrité qua­si magis­trale des textes du groupe Indo­chine. À défaut d’être fidèle au gaullisme, Nathalie l’est à Bob Morane.

France Inter vs Houellebecq

Si les poli­tiques des par­tis dom­i­nants, à l’instar des jour­nal­istes qui les inter­ro­gent, mari­nent tous peu ou prou dans la même soupe tiède idéologique, il est des élé­ments qui néan­moins y déro­gent, par­mi quoi, essen­tielle­ment : cer­tains écrivains et la réal­ité. Ces deux types d’éléments vont agir de manière con­juguée le mer­cre­di 7 jan­vi­er 2015 pour faire éclater de manière bru­tale toutes les con­tra­dic­tions internes du mul­ti­cul­tur­al­isme tel que le prô­nent en chœur Sarkozy, Hol­lande, Le Monde et France Inter. Le pre­mier de ces élé­ments, Michel Houelle­becq, est plus prévis­i­ble que le sec­ond, et on par­le déjà de lui les jours précé­dents sa venue. Une polémique le précède en rai­son du sujet de son dernier roman Soumis­sion, fic­tion d’anticipation poli­tique envis­ageant l’arrivée au pou­voir d’un par­ti musul­man en France, en 2022, grâce au con­sen­sus qua­si col­lab­o­ra­tionniste de l’UMP et du PS, con­tin­u­ant de désign­er comme enne­mi fon­da­men­tal le Front Nation­al de Marine Le Pen. Le 5 jan­vi­er, Isabel Pasquier, dans le jour­nal de 7h30, avait don­né ses impres­sions sur le livre qu’elle avait qual­i­fié de très « anti-poli­tique­ment cor­rect », expli­quant que le romanci­er tirait sur une France résignée et qu’il était dif­fi­cile de savoir à quel degré il fal­lait lire ce livre. Bref, le malaise pointe. Le lende­main, Thomas Legrand con­sacre sa chronique du jour à Soumis­sion, et il attaque le livre sur sa prospec­tive en la qual­i­fi­ant de par­faite­ment invraisem­blable. « Rien, dans la France d’aujourd’hui, ne peut laiss­er faire songer à l’émergence d’un Islam poli­tique. » Un 6 jan­vi­er 2015, c’est beau comme un con­stat d’amitié fran­co-alle­mande en juil­let 1914. Il con­clue sur le fait que les « par­ti­sans d’une République métis­sée » représen­teraient tou­jours, en France, la majorité (à rebours de tous les sondages), « n’en déplaise aux pétochards de tout poil. » 

Recycler « Pegida »

Le 7, un argu­ment tiré d’une actu­al­ité défor­mée qui n’a rien à voir, cette fois-ci, avec un bébé rom mort, mais qui tient au mou­ve­ment alle­mand « Pegi­da », va être four­bi con­tre Michel Houelle­becq, l’invité de la mati­nale. Patrick Cohen tente ain­si d’opposer à l’écrivain ce qui se passe selon lui en Alle­magne. Les rassem­ble­ments des « Patri­otes européens con­tre l’Islamisation de l’Occident » — Pedi­ga – vien­nent d’être con­trés par des man­i­fes­tants antiracistes. Or ces rassem­ble­ments, débutés à Dres­de en octo­bre 2014 sur le mod­èle de ceux ayant con­duits à la chute du Mur, et ayant atteint 25 000 per­son­nes au courant du mois de décem­bre, ont certes sus­cité des con­tre-man­i­fes­ta­tions, mais celles-ci n’ont pu faire mesure qu’à con­di­tion d’être con­vo­quées sur toute l’Allemagne après avoir été encour­agées par tous les médias, les églis­es, le gou­verne­ment et 90% des par­tis poli­tiques ! En out­re, un sondage du Zeit mon­tre que 49% des Alle­mands se trou­vent en accord avec les reven­di­ca­tions de Pegi­da. Ce qui donc est sig­ni­fi­catif, c’est l’ampleur et la pop­u­lar­ité d’une man­i­fes­ta­tion ini­tiée de manière spon­tanée, et pour­tant com­bat­tue par toutes les instances pos­si­bles de pou­voir. Mais il n’est pire sourd que celui qui ne veut enten­dre. Ain­si, Bernard Guet­ta, le 7 jan­vi­er, vante-t-il la « con­damna­tion unanime de Pegi­da » (il veut dire par l’unanimité des pou­voirs en Alle­magne), qu’il résume à des « man­i­fes­ta­tions de peur » néan­moins « locales et lim­itées ». La veille, le même chroniqueur nous avait exposé com­ment les par­tis poli­tiques d’extrême-gauche qui ont le vent en poupe en Grèce et en Espagne, « Syriza » et « Podemos », ne représen­taient finale­ment pas des bolchéviques assoif­fés de sang mais demandaient seule­ment la fin des poli­tiques d’austérité et qu’il fal­lait savoir rai­son garder. Guet­ta n’avait pas tort sur ce point. Mais au lieu d’appliquer cette mesure le lende­main à Pegi­da, en con­sid­érant que ces rassem­ble­ments ne coor­don­naient pas des chemis­es brunes prêtes à restau­r­er le Nation­al-Social­isme mais sim­ple­ment des citoyens deman­dant la fin des poli­tiques d’ensevelissement de leur peu­ple, de leurs mœurs et de leur cul­ture par d’autres, ce qui con­stitue finale­ment une requête aus­si raisonnable que légitime, le voici qui déclare : « C’est une peur dont la dérai­son fait peur. » Out­re le ridicule d’une telle for­mule, con­sid­érons ce qu’elle sig­ni­fie. Le 7 jan­vi­er au matin, à France Inter, on exhibe son mépris des « pétochards », et s’il arrive qu’on ait mal­gré tout peur, c’est de la folie de la part de ceux qui dénon­cent une pré­ten­due islami­sa­tion de la société occidentale…

Haro sur l’islamophobe

Patrick Cohen cite donc le pseu­do-exem­ple de Pegi­da tel que trafiqué par Bernard Guet­ta afin d’arguer à l’attention de Houelle­becq de la bonne vigueur des valeurs des Lumières. Il ne note pas que si l’Europe subit réelle­ment une islami­sa­tion, laque­lle réduirait à néant toutes les valeurs human­istes occi­den­tales en com­mençant par l’égalité homme-femme, c’est, en ce cas, Pegi­da qui serait actuelle­ment en posi­tion de défendre ces valeurs-là. Mais il ne faut pas trop en deman­der à un « cerveau sain »… Houelle­becq explique alors que les hommes poli­tiques, les juges comme les jour­nal­istes sont méprisés par la pop­u­la­tion, à un point qui en devient alar­mant, argu­ment solide qui représen­tera sans doute sa meilleure défense. Dans sa revue de presse, Bruno Duvic cite l’inénarrable Plenel qui affirme que les Camus, Zem­mour ou Houelle­becq véhicu­lent rien moins qu’une idéolo­gie meur­trière. Christophe Bar­bi­er attaque. Marc Weitz­mann par­le de la tox­i­c­ité de Houelle­becq… Dire que tous ces gens, un jour plus tard, « seront Char­lie » ; qu’ils s’insurgeront au nom d’une lib­erté d’expression qu’ils con­spuent pour lors, et qu’ils plain­dront des dessi­na­teurs assas­s­inés par des ter­ror­istes parce que désignés notam­ment comme « islam­o­phobes » ! Pour l’heure, on n’en est pas encore à l’exécution par les bour­reaux islamistes, mais à la dénon­ci­a­tion par les juges de gauche. La comique de ser­vice, Nicole Fer­roni, s’y met­tra égale­ment et emploiera sa chronique à ten­ter de ramen­er à la rai­son un écrivain de la stature de Houelle­becq qui, on n’en doute pas, avait rude­ment besoin des leçons sin­gulières de l’amuseuse publique, leçons qui se con­clu­ent donc par le fait que c’est avec « la peur à laque­lle on per­fuse la France que l’on peut amen­er la France droit dans le mur. » Cette peur, pour­tant, est étrange­ment partagée par Pas­cal, un audi­teur qui trou­ve, lui, que Houelle­becq est courageux, juste­ment. Il faut dire que l’auditeur en ques­tion habite Évry, est témoin de l’évolution de la pop­u­la­tion et des mœurs et dit envis­ager depuis quinze ans le scé­nario de Soumis­sion… Par une étrange et soudaine man­sué­tude, l’auditeur ne sera pas accusé de voir ce qu’il voit par les com­mis­saires poli­tiques de France Inter, avant d’être traité de fas­ciste, de voir con­damn­er ses pro­pos nauséabonds et que l’animateur lui rac­croche au nez tout en appelant la France entière à le fuir comme un pes­tiféré. Les mêmes pro­pos, dans la bouche d’un Zem­mour ou d’un Camus, auraient pour­tant immé­di­ate­ment entraîné une telle réac­tion. On épargne, désor­mais, le sim­ple auditeur.

France Inter vs Charlie

Et puis, cette semaine de pro­pa­gande mul­ti­cul­tur­al­iste et libérale-lib­er­taire exé­cutée, main sur le cœur, par les gag­nants de la mon­di­al­i­sa­tion, dérape brusque­ment dans le drame. Les con­frères de Char­lie Heb­do, ce vieux fanzine soix­ante-huitard glob­ale­ment remisé du côté du folk­lore mais néan­moins cohérent sur cer­tains de ses fon­da­men­taux, se font liq­uider à la kalach­nikov par les frères Kouachi, ceux-ci pré­ten­dant venger de la sorte le prophète des mahomé­tans. La Charia appliquée manu mil­i­tari en plein cœur de Paris (quoique la Charia, d’après ce qu’on nous expli­quera durant toute la mat­inée, n’ait rien à voir avec l’Islam). De n’avoir suff­isam­ment « pétoché » quand il était encore temps, comme tou­jours : les voisins en sont morts, le pays est à genoux, et, décou­vrant avec effare­ment ce que dénon­cent ceux qu’ils insul­tent depuis des années, les jour­nal­istes de France Inter sont morale­ment dévastés, et assureront comme ils le peu­vent une édi­tion du 8 jan­vi­er où les voix s’étranglent à l’orée des micros. Les jour­naux sont précédés d’un com­mu­niqué de con­doléances et d’hommage lu par Lau­rence Bloch. Le directeur de la sta­tion et ancien rédac­teur en chef de Char­lie Heb­do, Philippe Val, est inter­viewé par Léa Salamé, et, tout en dres­sant une dichotomie selon laque­lle il exis­terait une bonne irrévérence et une mau­vaise irrévérence, une bonne cri­tique de l’Islam et une mau­vaise cri­tique de l’Islam, Val case ses anciens col­lègues dans la pre­mière caté­gorie et amorce leur canon­i­sa­tion civique. « Il faut que les gens répub­li­cains qui ne sont pas racistes repren­nent une vraie cri­tique de ce qui se passe ! » énonce le patron, sans réalis­er que la moin­dre cri­tique de « ce qui se passe », comme le prou­vent tous les jours les chroniqueurs de sa radio, vous exclue mécanique­ment du cer­cle des répub­li­cains et vous coud au revers de la veste l’étoile jaune du raciste à abat­tre, ce qui rend par con­séquent une telle propo­si­tion stricte­ment irréal­is­able. La sidéra­tion pousse au mys­ti­cisme, même quand il s’agit de louanger des athées mil­i­tants, aus­si l’équipe de Charb se ver­ra en cette mat­inée chargée d’auréoles – il suf­fit ensuite, comme le fait sans la moin­dre gêne, Char­line Van­hoe­nack­er, de s’identifier aux vic­times encore fraîch­es pour béné­fici­er d’un éclat au pas­sage et à bon compte, et même si on a tou­jours fait par­tie du camp de ceux qui désig­nent, à défaut de les abat­tre, les islam­o­phobes ; et non du camp de ceux qui pren­nent des risques.

La version officielle

Le min­istre de l’intérieur, Manuel Valls, inter­vient à 8h15. Alors qu’on pour­rait lui reprocher de n’avoir su met­tre en œuvre une poli­tique de sur­veil­lance des dji­hadistes suff­isam­ment effi­cace, le voilà qui cou­vre sa faute en désig­nant des boucs-émis­saires. Patrick Cohen, dont le cerveau sain repère instan­ta­né­ment ce genre de réflex­es, cette fois-ci, reste coi. Il faut dire que nous sommes sur l’antenne du pou­voir social­iste et que les boucs-émis­saires sont de droite. « Nous avons lais­sé ces dernières années s’installer des dis­cours qui frac­turent la société française. », annonce le min­istre, lais­sant très claire­ment enten­dre que tout cela est de la faute d’Éric Zem­mour (peut-être un peu de Dieudon­né aus­si). À moins que ces dis­cours qui frac­turent la société française fassent référence aux car­i­ca­tures du prophète, à l’agression sym­bol­ique qu’elles représen­tent pour une par­tie de la pop­u­la­tion, auquel cas il fau­dra bien admet­tre que Manu n’est pas Char­lie. Bernard Guet­ta pour­suit ensuite dans cette croy­ance puérile en la prophétie auto-réal­isatrice qui le car­ac­térise et dont il a déjà fait usage au sujet de Pegi­da en annonçant que « d’instinct la France s’est rassem­blée », comme s’il était en posi­tion de le mesur­er, et tan­dis que des signes inquié­tants de divi­sion autour de ce drame ne cesseront de s’accumuler dès le jour suiv­ant. Abden­nour Bidar, invité avec Robert Bad­in­ter, désign­era lui aus­si les vrais dan­gers qui sont, bien évidem­ment, les pro­pos d’Eric Zem­mour et on nous met­tra mille fois en garde con­tre les amal­games. « La France rassem­blée ; pas d’amalgame ; Zem­mour coupable » : tout cela sem­ble une feuille de route du gou­verne­ment docile­ment suiv­ie par les jour­nal­istes de la radio d’État. En atten­dant, les pre­mières dis­cor­dances avec cette ver­sion offi­cielle sont déjà bien vis­i­bles sur les réseaux soci­aux où fait déjà scan­dale une liste de tweets de sou­tien aux ter­ror­istes, postés par de jeunes inter­nautes de banlieue.

On ne change pas une méthode qui marche…

Lors de la dernière mati­nale de la semaine, le ven­dre­di 9 jan­vi­er, on repren­dra de manière plus énergique – une fois passée la sidéra­tion — la stratégie de la veille. On étouffe tout ce qui dérange (on évo­quera à peine les prob­lèmes dans les class­es alors que sur d’autres médias se mul­ti­plient les témoignages de pro­fesseurs de ban­lieue ne par­venant à soumet­tre leurs élèves à leur devoir d’hommage nation­al…) On con­tin­ue de s’auto-convaincre avec la salive inus­able de Bernard Guet­ta qui nous explique que le dji­hadisme est dans l’impasse et que l’État Islamique sera vain­cu (aucun soucis à se faire alors !) Et l’on manip­ule les évène­ments pour les retourn­er con­tre l’ennemi idéologique (Zem­mour tou­jours). Ce matin-là Thomas Legrand recy­clera la com­pas­sion que sus­ci­tent les dessi­na­teurs morts de Char­lie Heb­do pour ten­ter de l’identifier à l’esprit 68 que ceux-ci incar­naient et retourn­er ain­si ces sen­ti­ments con­tre les pour­fend­eurs de 68, les « déclin­istes », de la sorte mis sur le même plan que les assas­sins de Charb et Cabu… La méth­ode est dégueu­lasse, mais surtout, Legrand a‑t-il été mis au courant que ce n’est pas pour « soix­ante-huitardisme » mais pour « islam­o­pho­bie » et pour « blas­phème » qu’ont été exé­cutés les dessi­na­teurs ? Ce qui situe juste­ment Zem­mour et Houelle­becq sur leur ligne, eux qui seront les jours suiv­ants mis sous pro­tec­tion poli­cière, con­traire­ment à Thomas Legrand.

Une radio à la pointe

Ain­si, nous l’avons vu de manière fla­grante durant cette semaine dont les actu­al­ités furent si reten­tis­santes, la mati­nale de France Inter ressem­ble davan­tage à une machine de for­matage idéologique directe­ment affil­iée au pou­voir social­iste qu’à un relais objec­tif d’informations nour­ri de points de vue divers et cri­tiques. L’équipe divulgue un dis­cours uni­voque, de l’animateur prin­ci­pal au dernier des comiques ; l’information est dis­simulée ou sur­ex­posée et directe­ment ré-exploitée selon l’usage mil­i­tant qu’on peut faire d’elle ; et la pres­sion idéologique est telle, dans cette sphère her­mé­tique, que les pires évène­ments venus de l’extérieur ne peu­vent avoir rai­son du moin­dre détail de la vul­gate, quitte à ce que ses prop­a­ga­teurs se voient oblig­er d’assumer les con­tra­dic­tions les plus man­i­festes. Pre­mière sur ce créneau horaire ; pre­mière dans la dénon­ci­a­tion de déviants ; pre­mière dans le ser­vice du pou­voir ; pre­mière dans la divul­ga­tion de l’idéologie offi­cielle : France Inter, avec sa mati­nale, est vrai­ment à la pointe de la propagande.