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Les actions en justice : fin de la liberté d’expression par l’intimidation

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6 mars 2018

Temps de lecture : 4 minutes
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Les actions en justice : fin de la liberté d’expression par l’intimidation

Temps de lecture : 4 minutes

Alors que le gouvernement entend légiférer sur les « fake news » et nous apprendre où est la vérité, alors que Facebook, Twitter et YouTube font le ménage par le vide, un autre danger pour la liberté d’expression est l’intimidation par les actions en justice. En voici quelques exemples.

Un écrivain et deux enseignants menacés

Le Point le rel­e­vait en décem­bre 2016, c’est dans une « indif­férence médi­a­tique générale » que l’essayiste Pas­cal Bruck­n­er a com­paru le 30 novem­bre 2016 devant la 17e cham­bre du Tri­bunal de Grande Instance de Paris. Il était traduit en jus­tice pour avoir déclaré sur le plateau de 28 Min­utes, l’émission d’Arte, qu’il fal­lait « faire le dossier des col­la­bos, des assas­sins de Char­lie ». Il a été relaxé le 17 jan­vi­er 2017.

En 2016, un ex-enseignant d’un lycée musul­man de Lille, Sofi­ane Zitouni, était pour­suivi pour avoir pub­lié plusieurs arti­cles faisant état de dérives islamistes au sein de l’établissement, dont une tri­bune parue en févri­er 2015 dans le jour­nal Libéra­tion. Il a lui aus­si été relaxé le 7 févri­er 2017.

Comme le relatait le site Atlanti­co, l’historien Georges Ben­sous­san a été traduit en jus­tice en 2017 pour « délit de provo­ca­tion à la dis­crim­i­na­tion, la haine, la vio­lence à l’égard d’un groupe de per­son­nes à rai­son de l’appartenance à une reli­gion déter­minée ». Pour mémoire, Georges Ben­sous­san a con­tribué à l’ouvrage col­lec­tif sor­ti en 2002 « Les ter­ri­toires per­dus de la République » et à celui paru en 2017 « Une France soumise ». Il lui était reproché d’avoir, au cours de l’émission Répliques sur France Cul­ture, évo­qué un cer­tain «  anti­sémitisme vio­lent et banal­isé ». Il a été relaxé le 7 mars 2017. Atlanti­co se réjouit de ce ver­dict qui con­stitue un signe posi­tif pour la lib­erté d’expression Il n’en faut pas moins oubli­er que le Par­quet a fait appel du juge­ment de relaxe.

Un livre autour du procès con­tre l’historien est sor­ti récem­ment. Par­mi les con­tribu­teurs, la démo­graphe Michèle Trib­al­at qui prodigue quelques con­seils présen­tés par Le Figaro : «  Sauf à être un chanteur de rap ou à appartenir à une minorité eth­nique ou religieuse, évitez tout ce qui ressem­ble à une général­i­sa­tion, une essen­tial­i­sa­tion, oubliez les métaphores de la langue française, veillez au bon usage des arti­cles ».

Riposte laïque persécuté

Dans le même esprit Pierre Cassen de Riposte laïque a été con­damné à trois ans de prison avec sur­sis dans une affaire où il avait déjà été relaxé par la XVI­Ième cham­bre, ce en son absence et celle de son avo­cat. Comme Risposte laïque subit une véri­ta­ble avalanche de procès, la prison ferme sem­ble proche. Au même moment Chris­tine Tasin de Résis­tance répub­li­caine était con­damnée en appel pour avoir crié « Islam assas­sin » lors d’une man­i­fes­ta­tion con­séc­u­tive à l’assassinat de deux policiers à Mag­nanville par un tueur qui s’était réclamé du Coran. Con­damna­tion à une amende de 1500 euros plus 2000 euros pour la LICRA et autant pour la Ligue des droits de l’homme.

Mêmes mésaven­tures (au pluriel) pour un ancien mem­bre des Frères Musul­mans, Mohamed Louizi, qui com­bat désor­mais l’islamisme. Comme l’indique Mar­i­anne, « alors qu’il venait d’être mis en exa­m­en ce mer­cre­di 7 févri­er 2018, par une juge d’instruction au TGI de Lille, dans le cadre d’un 5ème procès pour diffama­tion, inten­té con­tre l’un de ses arti­cles », il a été enten­du le 16 févri­er 2018 dans le cadre d’une nou­velle plainte déposée con­tre lui. Il a com­mencé le 17 févri­er 2018 une grève de la faim en signe de protestation.

Justice instrumentalisée

Sans remet­tre en cause le droit d’ester en jus­tice si l’on s’estime dif­famé, l’irruption des actions juridiques dans le débat d’idées est une pente dan­gereuse. Comme indiqué sur le site Voir et dire ce que l’on voit, on assiste à un « usage, sinon l’instrumentalisation, de plus en plus régulière de la jus­tice démoc­ra­tique comme tri­bune pour des groupes d’influence sou­vent motivés par une idéolo­gie politi­co-religieuse ». Dans ce cadre, plusieurs citoyens, dont Georges Ben­sous­san, ont décidé de créer une asso­ci­a­tion. Son objec­tif est d’ « attir­er l’attention du pub­lic sur les risques que nous font courir col­lec­tive­ment et indi­vidu­elle­ment les dis­cours visant à restrein­dre les lib­ertés indi­vidu­elles en par­ti­c­uli­er au moyen de l’intimidation judi­ci­aire ». Voire se défendre quand un citoyen fait l’objet d’un procès visant à « démêler le vrai du faux dans des débats his­toriques, soci­ologiques, sta­tis­tiques ». Ce qui n’est pas la voca­tion de la jus­tice. Puisse cette asso­ci­a­tion ne pas être trop sou­vent sollicitée…