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Accueil | Portraits | Érik Izraelewicz

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31 mai 2018

Temps de lecture : 11 minutes

31 mai 2018

Accueil | Portraits | Érik Izraelewicz

Érik Izraelewicz

Temps de lecture : 11 minutes

Le défenseur de l’ordre économique

Érik Izraelewicz est né en 1954 à Strasbourg. Après une prépa HEC au lycée Kléber de Strasbourg, il intègre l’école des Hautes Études Commerciales (HEC) dont il ressort diplômé en 1976. Il est également diplômé du Centre de Formation des Journalistes (CFJ, promotion 1978) et Docteur en économie internationale (1979). Il est mort le 27 novembre 2012 à Paris, au siège du journal Le Monde, victime d’un infarctus, à l’âge de 58 ans.

Parcours professionnel

Érik Izraelewicz com­mence sa car­rière comme jour­nal­iste économique à l’heb­do­madaire L’U­sine nou­velle (1979–1981). Il entre ensuite au bimen­su­el L’Ex­pan­sion (1981–1984). Il par­ticipe à la créa­tion du quo­ti­di­en La Tri­bune de l’é­conomie en 1985. Érik Izraelewicz intè­gre le ser­vice économie de la rédac­tion du Monde en avril 1986. Il est spé­ci­fique­ment en charge des ban­ques, des assur­ances et de la con­jonc­ture finan­cière française. En décem­bre 1988, il est nom­mé chef-adjoint du ser­vice « économie » avant d’en pren­dre la tête en sep­tem­bre 1989. En 1991, il est nom­mé édi­to­ri­al­iste économique. Il est ensuite cor­re­spon­dant du jour­nal à New York de 1993 à 1994. En 1996, il est nom­mé rédac­teur en chef du quo­ti­di­en du soir. En par­al­lèle, il tient une chronique économique sur Europe 1.

Il s’essaie, sans suc­cès, à la restau­ra­tion : « Au milieu des années 1980, avec quelques amis et amies à la fois de gauche et “busi­ness friend­ly”, Erik allait s’es­say­er à l’en­tre­prise en achetant un restau­rant situé der­rière la Fontaine de Mars, dans le 7e arrondisse­ment : L’Ex­po. S’en­suivirent quelques joyeuses soirées et un reten­tis­sant bouil­lon. Je ne sais plus quand Erik a fini de rem­bours­er les dettes, mais c’é­tait longtemps après » (Le Monde, op. cit).

Érik Izraelewicz

Érik Izraelewicz. Illus­tra­tion par suzyQ pour l’Ojim.

Après qua­torze années au Monde, il quitte le jour­nal en jan­vi­er 2000 pour rejoin­dre le quo­ti­di­en économique Les Échos comme rédac­teur en chef et édi­to­ri­al­iste, chargé de dévelop­per la rubrique « idées ». Il en devient le directeur adjoint en 2004, puis le directeur de la rédac­tion en 2007, pour une brève péri­ode. Il quitte Les Échos en 2008, hos­tile au rachat du titre par le groupe LVMH, auquel il préférait la FIMALAC de Marc Ladre­it de Lachar­rière (mem­bre comme Izraelewicz du Siè­cle et du Bilder­berg Group).

Il rejoint alors La Tri­bune, que Bernard Arnault vient de ven­dre à Alain Weill, égale­ment mem­bre du Siè­cle, homme d’af­faire très présent dans l’au­dio­vi­suel avec son groupe Nex­tRa­dioTV (RMC, BFM). Érik Izraelewicz quitte égale­ment Europe 1 pour devenir chroniqueur sur les autres médias du groupe Nex­tRa­dioTV : RMC et BFM TV. Le titre étant en grande dif­fi­culté finan­cière, Alain Weill vend en mai 2010 La Tri­bune à sa direc­trice générale, Valérie Decamps, pour un euro sym­bol­ique. Le départ d’Alain Weill entraîne, en juil­let 2010, celui d’Érik Izraelewicz qui ne se sent plus autant d’affinités avec la nou­velle pro­prié­taire. Il fait savoir qu’il est « disponible » pour d’autres fonc­tions et présente sa can­di­da­ture aux action­naires du jour­nal Le Monde en jan­vi­er. Il est nom­mé directeur de pub­li­ca­tion du quo­ti­di­en le 7 févri­er 2011, adoubé par le comité de sélec­tion com­posé de Pierre Bergé, Louis Drey­fus et Gilles Van Kote. Ce choix est rat­i­fié par les jour­nal­istes du quo­ti­di­en à 74 % des voix, par les salariés à 75 % et par les cadres à 78 %, le 10 févri­er 2010.

Parcours militant

Il n’est pas encar­té, mais ses amis proches, si. Le Monde (28/11/2012) rap­pelle : « Les amis d’Érik Izraelewicz, Denis Kessler, autre Alsa­cien mon­té à Paris, et leur aîné Dominique Strauss-Kahn — qui fut le pro­fesseur d’Érik à HEC -, étaient de cette généra­tion social­iste gour­mande de réformes qui allaient façon­ner le monde tel qu’il est aujour­d’hui pour le meilleur et pour le pire ».

C’est encore avec des amis « de gauche » qu’il achète le restau­rant L’Expo. Mais l’aventure s’achève par une faillite.

L’Humanité (29/11/2012), enfonce le clou : « Social­iste, Erik Izraelewicz avait pour amis Dominique Strauss-Kahn, qui a été son pro­fesseur, ou Denis Kessler »

Publications

  • Les Muta­tions de l’é­conomie mon­di­ale 1975–1990, (sous la direc­tion d’Alain Gélé­dan), Le Monde édi­tions, 1990.
  • Ce Monde qui nous attend, Gras­set, 1997.
  • Le Cap­i­tal­isme zinzin, Gras­set, 1999. Prix du livre d’é­conomie 1999.
  • Mon­sieur Ni-ni : l’é­conomie selon Jospin, Robert Laf­font, 2002 (avec Chris­tine Mital).
  • Quand la Chine change le Monde, Gras­set, 2005. Prix Aujour­d’hui 2005.
  • Faut-il crain­dre les cham­pi­ons des pays émer­gents ? avec Sébastien Dessil­lons, Thomas Mau­risse et Jean-Louis Bef­fa, le jour­nal de l’École de Paris du Man­age­ment, n°71, 2008–3
  • Ce que la crise a changé. 60 per­son­nal­ités imag­i­nent le monde de demain, SEFI, 2010 (sous la direc­tion d’Érik Izraelewicz).
  • L’arrogance chi­noise, Gras­set, 2011.

Collaborations

  • Col­loque de l’I­FA (Insti­tut de for­ma­tion des admin­is­tra­teurs) ani­ma­tion d’une table ronde – 20 novem­bre 2003.
  • Pre­mières ren­con­tres fran­co-alle­man­des pour la com­péti­tiv­ité de l’industrie – ani­ma­tion d’une table ronde – 19 jan­vi­er 2006.
  • Con­seil des ventes — La France et les ventes aux enchères publiques : défis et atouts — lun­di 6 Juin 2005 au Sénat – ani­ma­tion des débats.
  • Cham­bre de com­merce et d’in­dus­trie de Paris – ani­ma­tion d’une table ronde au col­loque « Quelles mégapoles à l’horizon 2030 : les défis soci­aux et économiques du développe­ment » 17 jan­vi­er 2006.
  • Insti­tut Nation­al de recherche sur les Trans­ports et leur sécu­rité – ani­ma­tion de la table ronde « Trans­port mar­itime et mon­di­al­i­sa­tion : tou­jours plus ou tou­jours moins ? » — 3 octo­bre 2009.
  • HEC Paris et les Ate­liers de la Terre ‑Trophées Rethink – Col­loque « Réin­ven­ter l’en­tre­prise, repenser l’é­conomie… » — ani­ma­tion d’une table ronde – 24 mars 2009.
  • Capgem­i­ni Con­sult­ing – ani­ma­tion de la table ronde organ­isée à l’oc­ca­sion de la sor­tie de Trig­gers (auteurs : Xavier Hochet et André-Benoît de Jaegère, de Capgem­i­ni Con­sult­ing, Odile Jacob, 2010) – 2 mai 2010.
  • 13ème journée du livre d’é­conomie — 7 décem­bre 2011 – ani­ma­tion de la Table ronde con­sacrée au thème « L’eu­ro : une mon­naie du passé ou une promesse d’avenir ? »
  • Brochure R.I.C, de for­mi­da­bles marchés à con­quérir ? du Crédit Agri­cole Sud Rhône Alpes
  • Field Action Sci­ence Reports – ani­ma­tion de la table ronde « Lutte con­tre la pau­vreté, entre don et marché », 6 mars 2012

Postérité

En 2014, le jour­nal Le Monde, le Cen­tre de for­ma­tion des jour­nal­istes de Paris et HEC Paris s’as­so­cient pour créer le prix Érik Izraelewicz de l’enquête économique qui a pour but d’en­cour­ager l’en­quête, l’ou­ver­ture au monde, la mise en per­spec­tive et le sens du réc­it des jour­nal­istes dans tous les champs de l’économie.

Ce qu’il gagne

Son préde­cesseur Eric Fot­tori­no revendi­quait un salaire de 400.000 € par an alors que le jour­nal était en forte dif­fi­culté ; pour sa part, son salaire était net­te­ment inférieur.

Il l’a dit

« Bref, le Dane­mark, c’était jusqu’à présent, avec une forte crois­sance, le Par­adis sur terre. Un seul prob­lème : le chô­mage ? Mais là-haut, le mod­èle tou­jours, il est trop bas. 3% seule­ment. Le pays manque en réal­ité de bras. La pénurie de main d’œuvre y men­ace la croissance.
Une solu­tion : ouvrir les fron­tières à l’immigration, la ques­tion a été au cen­tre des lég­isla­tives, mar­di. Les électeurs ont tranché. Entre la stag­na­tion et l’immigration… ils préfèrent la stag­na­tion ! L’extrême-droite a obligé depuis six ans le gou­verne­ment de cen­tre-droit à dur­cir les con­di­tions d’entrée dans le pays. Elle est sor­tie ren­for­cée de ces élec­tions. Le pre­mier min­istre sor­tant, Anders Ras­mussen, un cen­triste, garde la majorité. Il va devoir con­tin­uer à s’appuyer néan­moins sur cette extrême droite pour gou­vern­er, à restrein­dre encore davan­tage l’accueil de tra­vailleurs étrangers. Pour l’économie danoise, c’est une très mau­vaise nou­velle. Cette pénurie de main d’œuvre va y frein­er la crois­sance. En pesant sur les salaires, elle va y hand­i­ca­per la com­péti­tiv­ité de ses indus­tries. Elle va aus­si y pos­er, à terme, le prob­lème du finance­ment de la pro­tec­tion sociale, des retraites et de la san­té. Bref, c’est tout le mod­èle qui risque de s’écrouler. En fer­mant la porte de leur Par­adis, les Danois pren­nent le risque d’en faire un Enfer. Un choix qui appa­raît comme un mau­vais présage pour l’Europe, la France aus­si. Espérons que nous ne céderons pas, nous, à la si jolie sirène de Copen­h­ague !
», Les Échos, 15 novem­bre 2007.

« Eh bien, le choc de 87 a été plus vio­lent, plus soudain, plus bru­tal que celui de 29 ; il n’a pas eu les mêmes effets. Il n’a guère affec­té l’activité. Le Général De Gaulle dis­ait que « la poli­tique ne se fait pas à la cor­beille ». L’histoire mon­tre que l’économie non plus. La bourse a sa pro­pre res­pi­ra­tion, l’économie réelle la sienne. Sec­onde leçon : le krach de 87 n’a pas tué le marché non plus. Il aurait pu décourager les investis­seurs. Ils y sont revenus, très vite. Ils ont eu rai­son. L’indice Dow Jones valait 2200 points le 20 octo­bre 87. 20 ans après, il tourne autour de 14.000 points. Il a été mul­ti­plié par 6 en 20 ans. Sacrée santé.
Il est peu prob­a­ble que l’on con­naisse à nou­veau un tel krach. On remar­quera d’abord que depuis 20 ans, on n’en a plus vécu. Il y a bien eu quelques bour­rasques, jamais un coup de tor­chon aus­si vio­lent. Un recul de 5% ou 6% et c’est main­tenant déjà la panique. A tort, on le voit. La bourse reprend tou­jours, tôt ou tard, ses esprits : c’est la troisième leçon.
», Les Échos, 19 octo­bre 2007.

Sa nébuleuse

Érik Izraelewicz est admin­is­tra­teur de l’E­NA depuis 2001 et mem­bre de la Com­mis­sion économique de la nation depuis 1997. Il est égale­ment mem­bre du Con­seil sci­en­tifique du Cen­tre d’É­tudes Prospec­tives et d’In­for­ma­tions Inter­na­tionales (CEPII) depuis 1995.

Il est mem­bre du club Le Siè­cle depuis 2007 et appar­tient à l’in­sti­tut Aspen France, fil­iale française du club améri­cain d’essence mon­di­al­iste Aspen insti­tute. Érik Izraelewicz a par ailleurs par­ticipé à plusieurs repris­es au forum économique mon­di­al de Davos et a par­ticipé au Bilder­berg Group en juin 2012. C’est égale­ment un des rares Français à avoir suivi un stage de for­ma­tion aux États-Unis dans le cadre des Young Lead­ers.

En novem­bre 2012, Le Monde cite aus­si Denis Kessler et Dominique Strauss-Khan, ain­si que Joseph Stiglitz, Mar­tin Wolf, Amartya Sen, Fed­eri­co Rampi­ni, qu’il avait apporté aux Échos. Et Philippe Labarde, Jean-Michel Qua­tre­point et Jacques Jublin avec qui il fonde la Tri­bune de l’Économie.

On dit de lui

« Érik Israelewicz, édi­to­ri­al­iste mul­ti­carte, est l’exemple même de ces médi­acrates qui cir­cu­lent de radios en quo­ti­di­ens, d’hebdomadaires en émis­sions de télévi­sion, pour prêch­er la bonne parole économique. Et qui n’hésitent pas à se servir de leurs tri­bunes, de leurs posi­tions priv­ilégiées, pour con­tribuer à balis­er le débat économique. » ACRIMED, 20 févri­er 2012.

« Ce grand directeur ne fai­sait pas directeur. Cheveux plus ou moins dis­ci­plinés, lunettes de myope der­rière lesquelles il fal­lait aller chercher le regard bleu tou­jours en mou­ve­ment, un teint pâle comme l’ont ceux qui tra­vail­lent trop et dor­ment peu, la cra­vate en bataille — de préférence anthracite ou mar­ron -, la veste de bon tweed à qui il ne demandait rien de plus, les mains déchi­rant sem­piter­nelle­ment quelque coin de jour­nal qu’il mâchouil­lait ensuite nerveuse­ment, tel se présen­tait Erik Izraelewicz. Le débit sac­cadé, la voix s’é­tranglant par­fois de timid­ité, puis soudain un rire toni­tru­ant », Le Monde, 28/11/2012

« Lui, c’é­tait le tra­vail, le tra­vail, le tra­vail, plus le tal­ent, plus les idées, plus l’art du scoop, plus l’in­tel­li­gence aiguë des sit­u­a­tions, plus cet ingré­di­ent indéfiniss­able qui vous oblig­eait à recon­naître, par­fois en râlant, qu’il était le meilleur. Sa tra­jec­toire si bru­tale­ment inter­rompue aura été celle d’un jour­nal­iste économique, ou plutôt d’ailleurs un jour­nal­iste “écon­o­miste”, durant l’âge d’or de la presse économique », ibid.

« Il est telle­ment secret ! De sa vie per­son­nelle, on ne con­nais­sait que des bribes. Indu­bitable­ment alsa­cien, il pra­ti­quait un très dis­cret patri­o­tisme : au détour d’une phrase on appre­nait qu’il avait dîné la veille avec les Alsa­ciens de Paris. Il s’ap­pelait Izraelewicz mais l’his­toire famil­iale était encore plus com­pliquée que le patronyme, on y croi­sait des rab­bins et des bonnes soeurs. Il aimait ses par­ents, dis­parus l’un en 2008, l’autre, sa mère, en 2012, ses frères et soeurs, ses neveux. […] quand il fal­lait pour­tant dire non, ou se sépar­er de quelqu’un, il lou­voy­ait le plus longtemps pos­si­ble », ibid.

« Sa faib­lesse de man­age­ment, c’était d’être un pois­son rouge dans un banc de pira­nhas », Libéra­tion 30/11/2018

Crédit pho­to : Raphael Lab­bé — Lea­far via Wikimedia

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