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Migrants : hébétude sentimentale et sidération par l’image

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22 septembre 2015

Temps de lecture : 7 minutes
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Migrants : hébétude sentimentale et sidération par l’image

Temps de lecture : 7 minutes

L’image, dans cette campagne, joue un rôle fondamental. Il s’agit d’émouvoir, d’émouvoir et d’émouvoir encore, jusqu’à éradiquer l’esprit critique. Refuser, ou même simplement questionner ce qui est en train de se passer vous transforme alors immédiatement en salaud.

Pour des raisons éminem­ment idéologiques, la plu­part des grands médias a décidé que l’invasion migra­toire que subis­sait actuelle­ment l’Europe était une bonne chose, et ce sur tous les plans : économique, démo­graphique, poli­tique et surtout moral. L’enthousiasme des élites pro-immi­gra­tion vire par­fois car­ré­ment à l’hystérie ; non con­tent du mil­lion de migrants que son pays va accueil­lir cette année, le min­istre de l’intérieur alle­mand Thomas de Maiz­ières veut à présent directe­ment « chercher les réfugi­er dans les zones de guerre ».

Au cours d’une réu­nion de maires à la Mai­son de la chimie le 12 sep­tem­bre, on a pu voir un préfet de la République ten­ter d’arracher son dis­cours au maire de Beau­caire Julien Sanchez opposé à la poli­tique gou­verne­men­tale, le tout dans une étrange ambiance de lyn­chage (ce qui n’a pas empêché TF1 d’estimer que c’était le maire de Beau­caire qui avait crée l’incident). Quant à Emmanuelle Cosse, la patronne des Verts (du moins ce qu’il en reste), elle déclarait le 15 sep­tem­bre dernier sur RTL que la France et l’Europe pou­vaient accueil­lir les migrants « sans lim­ite », ce qui en bon français sig­ni­fie un, dix, cent mil­lions ou pourquoi pas un mil­liard. Cet ent­hou­si­asme ne sem­ble toute­fois pas partagé par tous, et le prési­dent du sec­ours pop­u­laire Julien Lauprêtre par­le même de « raz-de-marée de la mis­ère qui se développe en France ».

Depuis le début de cette crise migratoire, les grands médias se sont ainsi lancés dans une formidable campagne visant à sidérer l’opinion publique et à lui faire admettre que refuser, ou même simplement questionner ce qui était en train de se passer vous transformait immédiatement en salaud. L’image, dans cette campagne, joue un rôle fondamental. Il s’agit d’émouvoir, d’émouvoir et d’émouvoir encore, jusqu’à éradiquer l’esprit critique.

Les pho­tos de migrants pub­liées par la presse sont ain­si savam­ment choisies pour ras­sur­er, mais aus­si pour sus­citer la pitié et la sym­pa­thie. Ain­si, sans par­ler de la pho­to du petit Aylan (pitié) qui a représen­té un cli­max en la matière, ce sont sou­vent des enfants, des cou­ples ou des familles qui sont représen­tées (sym­pa­thie) même si l’on sait qu’entre 70 et 80% de ces migrants sont des jeunes hommes.

Comment ne pas être touché par cette photo diffusée par la BBC d’un couple s’embrassant devant la mer ?

Com­ment ne pas être touché par cette pho­to dif­fusée par la BBC d’un cou­ple s’embrassant devant la mer ?

Com­ment ne pas être touché par cette pho­to dif­fusée par la BBC d’un cou­ple s’embrassant devant la mer ? Ou de cette autre pho­to d’un cou­ple ray­on­nant de joie et de beauté enlacé dans un train ?

Et cette autre photo d’un couple rayonnant de joie et de beauté enlacé dans un train ?

Et cette autre pho­to d’un cou­ple ray­on­nant de joie et de beauté enlacé dans un train ?

Ne faut-il pas être un sans-cœur pour évo­quer des prob­lèmes de coûts, de lim­ite des capac­ités d’accueil ou de sauve­g­arde de son iden­tité ? Quand il s’agit d’hommes seuls, ceux que l’on pho­togra­phie ou que l’on inter­view sont générale­ment d‘âge mûr, éduqués, occi­den­tal­isés, exerçant des pro­fes­sions val­orisées et par­lant anglais. Bref, des gens dont on doit sen­tir qu’ils s’intégreront très facile­ment et qu’ils ne poseront aucun prob­lème, des gens polis qui feraient somme toute de très sym­pa­thiques voisins. Quant aux cohort­es de jeunes gens sans for­ma­tion, de déser­teurs de l’armée légale ou de mar­gin­aux à la dérive, un voile pudique les recouvre.

Ne se sen­tant aucune lim­ite, là non plus, dans la voca­tion qu’ils se sont don­née, les médias met­tent à présent en scène des migrants fuyant avec leurs ani­maux domes­tiques. Ain­si ce beau jeune homme souri­ant por­tant dans une servi­ette nouée sur le ven­tre son petit chaton…

Ainsi ce beau jeune homme souriant portant dans une serviette nouée sur le ventre son petit chaton…

Ain­si ce beau jeune homme souri­ant por­tant dans une servi­ette nouée sur le ven­tre son petit chaton…

Que vous faut-il encore comme preuve de sa très grande human­ité ? Dans une vidéo d’Euronews, on peut voir « deux amis syriens par­tis de Damas qui ont décidé que leur jeune husky, Loos, ferait aus­si le voy­age vers l’Europe ». Serait-on inhu­main au point de refuser l’hospitalité à ce mignon petit toutou et à ses maîtres ? 

[no com­ment] Ils sont des mil­liers chaque jour à quit­ter leur terre pour pren­dre la direc­tion de l’Eu­rope en quête d’une vie meilleure. Alors que la plu­part des migrants ont tout lais­sé der­rière eux, cer­tains ont emmené dans leur bagage leur ani­mal de com­pag­nie. C’est le cas de Mohammed Muraseen et Saf­fa Hus­sein, deux amis syriens par­tis de Damas qui ont décidé que leur jeune husky, Loos, ferait aus­si le voy­age vers l’Europe

Post­ed by euronews on lun­di 21 sep­tem­bre 2015

 
Ailleurs, c’est un autre cou­ple, tou­jours beau et souri­ant, avec son chien « John­ny » qui nous demande gen­ti­ment le droit de venir le promen­er dans nos parcs pour qu’il puisse jouer avec nos petits toutous à nous (promis, on ramassera les crottes).

Ailleurs, c’est un autre couple, toujours beau et souriant, avec son chien « Johnny »

Ailleurs, c’est un autre cou­ple, tou­jours beau et souri­ant, avec son chien « John­ny ». Crédit : UNHCR/D.Manchev

Dans un con­ti­nent attaché à ses ani­maux de com­pag­nie et sen­si­ble à la con­di­tion ani­male, nulle doute que l’argument touchera les âmes sen­si­bles. Nul doute non plus que les médias sont prêts à toutes les manip­u­la­tions pour main­tenir la pop­u­la­tion dans un état d’hébétude sen­ti­men­tale et lui faire accepter paci­fique­ment de céder la place.