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Les débuts compliqués (et risqués) d’Africanews

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25 avril 2016

Temps de lecture : 4 minutes
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Les débuts compliqués (et risqués) d’Africanews

Temps de lecture : 4 minutes

Filiale d’Euronews SA, la chaîne Africanews a été lancée mercredi 20 avril avec pour but de couvrir tout le continent. Un projet aussi ambitieux que risqué.

Pour le moment, la rédac­tion est instal­lée à Pointe-Noire, cap­i­tale économique du Con­go. Celle-ci est bilingue, fran­coph­o­ne et anglo­phone, et compte une cinquante de jour­nal­istes de quinze nation­al­ités ain­si que 45 cor­re­spon­dants répar­tis sur le con­ti­nent. « Nous prévoyons de pro­duire une quar­an­taine de sujets par jour. Nous avons conçu Africanews comme une chaîne d’information en con­tinu qui soit général­iste avec un prisme économique assez fort. Nous n’avons pas vrai­ment de con­cur­rents, car notre ambi­tion est con­ti­nen­tale », a déclaré au Monde Michael Peters, prési­dent du direc­toire d’Euronews et prési­dent d’Africanews.

Bien que détenue à 100 % par Euronews SA, la chaîne a été lancée « sous une mar­que pro­pre (…) car cette chaîne est africaine ». Le siège défini­tif est tou­jours en con­struc­tion. C’est le Con­go, seul pays qui aurait rem­pli toutes les con­di­tions de respect de la lib­erté édi­to­ri­ale et ayant aidé à implanter les locaux, qui a été choisi. Le nou­v­el immeu­ble, flam­bant neuf, sera donc situé à Braz­zav­ille, cap­i­tale du pays. Il a été offert en « cadeau » par le régime du prési­dent Denis Sas­sou-Ngues­so, au pou­voir depuis plus de 32 ans.

Un cadeau sans con­trepar­tie ? Du côté de Michael Peters, on assure que oui. « Africanews est incon­testable­ment un atout pour le Con­go qui con­stru­it notre siège et nous aide sur le plan logis­tique, mais aus­si au niveau des douanes pour importer le matériel », explique-t-il. Et d’a­jouter : « Africanews est une société de droit con­go­lais, mais nous sommes libres d’aborder tous les sujets sans aucune ingérence dans notre ligne édi­to­ri­ale, c’est une con­di­tion claire dès le départ. »

Mal­gré tout, com­ment demeur­er indépen­dant et totale­ment libre dans un pays classé 115e au classe­ment mon­di­al de la lib­erté de la presse selon RSF et qui par­ticipe finan­cière­ment et matérielle­ment (siège, fibre optique…) au lance­ment ? C’est toute la question…

Depuis une quin­zaine de jours, l’ar­mée et la police con­go­lais­es par­ticipent à une opéra­tion mil­i­taire dans la région du Pool, entre Braz­zav­ille et Pointe-Noire. Pour l’heure, aucun jour­nal­iste n’a pu pénétr­er dans la zone. Du côté du régime, on explique qu’il s’ag­it d’opéra­tions menées con­tre des ban­des armées favor­ables à un ancien chef de guerre, le pas­teur Ntu­mi, décrit comme un « illu­miné ». Mais d’après Amnesty Inter­na­tion­al, les frappes aéri­ennes menées par l’ar­mée auraient tué de nom­breux civils et con­traint beau­coup d’autres à fuir.

Si Africanews venait à avoir des images du théâtre d’opéra­tion, il s’a­gi­rait d’un véri­ta­ble scoop. Or pas un arti­cle ne fig­ure sur le site de la chaîne, lancé depuis jan­vi­er dernier. « On n’a pas prévu d’envoyer des reporters dans le Pool pour l’instant, mais nous n’hésiterons pas à le faire si on le décide. L’objectif n’est pas de cou­vrir le Con­go en par­ti­c­uli­er, mais bien tout le con­ti­nent », tente de se jus­ti­fi­er Nathalie Wakam, rédac­trice en chef adjointe d’Africanews… peu convaincante.

Cepen­dant, celle-ci assure que le Con­go n’a pas par­ticipé directe­ment au finance­ment de la chaîne, qui repose sur la pub­lic­ité, et que « si notre ton ne plaît pas aux autorités con­go­lais­es, on con­tin­uera d’émettre. On s’est tout de même assurés de cela ». Quoi qu’il en soit, ce pro­jet qui se présente comme totale­ment indépen­dant ne con­va­inc pas grand monde, surtout du côté de la jeunesse con­go­laise de Braz­zav­ille, qui surnomme déjà la chaîne « Télé-Sassou ».

Dans ce con­texte com­pliqué, « Africanews pour­rait bien être l’un des défis édi­to­ri­aux par­mi les plus risqués – et les plus exci­tants – du con­ti­nent », con­clut Le Monde.